Phosphore, phosphates

Phosphore, phosphates

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Le phosphore, présent dans l’eau, sur les substrats et au sein des organismes, est un constituant indispensable de la matière organique, notamment comme source d’énergie. Facteur limitant ou aggravant, c’est un régulateur de l’activité biologique. Il en est de même en aquarium. Cet article propose d’en balayer tous les aspects chimiques et biologiques, dans les océans et en aquarium, phosphore organique, inorganique, depuis ses effets, les risques de carence ou excès, les sources, sa consommation, sa mesure et les actions à engager.

1. Dans les océans

Depuis des millénaires, le phosphore marque les périodes de l’évolution terrestre. Après la période de glaciation son lessivage a vu son taux considérablement augmenter dans les océans, contribuant ainsi au développement des algues, à la production de l’oxygène atmosphérique et de la radiation, contribuant à l’émergence de quantité d’organismes pluricellulaires, avides d’oligoéléments tels que le phosphore. Des ancêtres d’organismes dont nous faisons partie.

1.1. Aspects chimiques

Le phosphore n’existe pas à l’état libre, seulement associé à d’autres composés. Son taux dans l’eau de mer avoisine 2 µg/l dans les eaux de surface mais beaucoup plus à l’approche des zones côtières d’activités humaines, présent sous deux formes principales :

  • Phosphates inorganiques, en particulier orthophosphates.
  • Phosphates organiques, disponibles ou non pour les organismes tels que les algues.

1.1.1. Phosphates inorganiques

Les ions orthophosphates sont des composés chimiques issus de l’acide phosphorique H3PO4 par perte ou substitution d’un ou plusieurs atomes d’hydrogène. Parmi ces derniers, le dihydrogénophosphate  H2PO4, l’hydrogénophosphate  HPO42-, et le phosphate PO43- sont les formes les plus fréquentes du phosphore inorganique. Par simplification, en aquariophilie on utilise le terme phosphate pour évoquer les différentes formes mesurées par les tests colorimétriques. En solution ces formes ioniques prédominent selon l’acidité de l’eau. Au pH 8,1 basique de l’eau de mer on trouve : 0,5 % H2PO4; 79 % HPO42- ; 20 % PO43-. Ce changement d’état trouve son importance lors des liaisons avec le carbonate de calcium en aquarium.

Faiblement basique   H2PO4  <-> HPO42-  <-> PO43-    fortement basique

Les polyphosphates sont les composés d’ions phosphates liés entre eux par un atome d’oxygène P-O-P. Instables dans l’eau, ils sont rapidement hydrolysés en phosphates inorganiques ou absorbés par les bactéries, les algues…

Sur terre les phosphates sont issus de l’érosion des terres avec, en sus aujourd’hui, les produits issus de l’activité humaine (agricole, industrie, déchets…).
Dans l’océan la concentration en orthophosphates sur les récifs est de l’ordre de 0,002 à 0.04 mg/l. Cette concentration varie dans des proportions considérables selon le lieu, la profondeur, dans la journée et surtout la proximité d’effluents rejetant des produits industriels, miniers ou agricoles. Les eaux de surface sont plus pauvres qu’en profondeur en raison des activités biologiques qui séquestrent le phosphate dans les organismes.

1.1.1. Phosphates organiques

Un phosphate organique, est une molécule comportant un élément carbone (la base de la chimie organique) et au moins un atome de phosphore. C’est un composé organophosphoré. Nous concernant, ces molécules sont produites par la matière des organismes vivants, la matière organique : ADN et ARN, phospholipides constituant en partie les membranes cellulaires, protéines etc. des poissons, invertébrés, végétaux. Ils jouent un rôle important dans la biologie des espèces vivantes. Leur rôle principal réside dans le transfert d’énergie et le stockage de l’information génétique. Ils sont cruciaux pour le métabolisme cellulaire et la transmission de l’information génétique d’une génération à l’autre.

Les formes organiques dans les tissus finissent par se décomposer dans l’eau à la mort des organismes. Leur minéralisation par les bactéries, accélérée par des enzymes les transforme en orthophosphates (inorganique) en partie remis en solution et de nouveau disponibles dans l’eau (cycle du phosphore).

Le tableau montre les concentrations relatives de C, N et P organiques dissous et la faible proportion de phosphore par rapport au carbone.

Matières organiques dissoutes
Composant Concentration
DOC (carbone organique) 60 à 90 mM
DON (azote organique) 3,5 à 7,5 mM
DOP (phosphore organique) 0,1 à 0,4 mM
ratio DOC/DON 9 à 18
ratio DOC/DOP 180 à 570
Source : Randy Holmes-Farley

1.2. Aspects biochimiques

Les formes de phosphore, organique et inorganiques, subissent des transformations dans le cadre de processus biogéochimiques dynamiques entre les océans et les continents, sans phase gazeuse pouvant affecter l’atmosphère : le cycle du phosphore.

1.2.1. Le cycle océanique du phosphore

Ce cycle régule la distribution et la disponibilité du phosphore pour les organismes marins, influençant ainsi la productivité biologique et la structure des écosystèmes marins. On peut résumer le cycle du phosphore dans les océans ainsi :

  1. Érosion, infiltration : les roches riches en phosphates, essentiellement de l’apatite s’érodent, en même temps que les pollutions issues des activités humaines, aujourd’hui très fortes dans le cycle, s’infiltrent dans les sols.
  2. Dissolution dans l’eau de mer : les particules de phosphore se dissolvent dans l’eau de mer, libérant des ions phosphates inorganiques.
  3. Assimilation par les organismes : les phytoplanctons absorbent le phosphore présent dans l’eau sous forme de phosphate inorganique. Ces organismes utilisent le phosphore pour construire des structures cellulaires, des acides nucléiques et d’autres molécules biologiques. Les algues absorbent directement les orthophosphates ou dégradent des phosphates organiques via des enzymes  pour libérer l’orthophosphate minéral assimilable. Certaines formes organiques peuvent aussi être assimilées par les organismes diazotrophes et les bactéries hétérotrophes
  4. Transfert dans la chaîne alimentaire : lorsque les organismes consomment d’autres organismes, le phosphore est transféré dans la chaîne alimentaire marine.
  5. Sédimentation, minéralisation : les organismes meurent et leurs débris organiques, riches en phosphore organique s’accumulent dans les profondeurs des océans. Les bactéries dégradent les matières organiques puis les minéralisent sous forme de phosphate inorganique libéré dans l’eau, ou enfoui dans les sédiments marins.
  6. Remontée des sédiments : les sédiments marins peuvent remonter à la surface par des processus géologiques tels que l’upwelling, apportant ainsi des phosphates inorganiques à la couche supérieure de l’océan, notamment au plancton poursuivant ainsi la boucle.
Cycle du phosphore dans les océans

1.2.2. Le phosphore dans les organismes vivants

Le schéma ci-dessus montre l’importance du phosphore, dans les couches superficielles des océans. D’une manière générale il agit dans tous les organismes vivants :

  • Développement cellulaire : constituant des acides nucléiques, qui portent l’information génétique, et d’autres molécules, le phosphore est indispensable à la reproduction, la division cellulaire et à la croissance. Il est aussi un constituant des phospholipides, composants majeurs des membranes cellulaires, essentielles pour maintenir l’intégrité des cellules et réguler les échanges avec l’environnement. Enfin, composant crucial de l’ATP, principale source d’énergie pour de nombreuses réactions cellulaires. Les organismes utilisent l’ATP pour stocker et libérer l’énergie nécessaire à leurs divers processus métaboliques (mouvement, croissance, photosynthèse…). Le phosphore contribue également à la transmission des signaux qui régulent les activités cellulaires.
  • Régulation du pH : Les phosphates sont impliqués dans la régulation du pH intracellulaire, contribuant à maintenir un environnement cellulaire optimal pour les réactions biochimiques.
  • Réactions métaboliques : Le phosphore participe à de nombreuses réactions métaboliques, agissant comme un cofacteur ou un activateur pour de nombreuses enzymes. Ces enzymes sont impliquées dans des processus tels que la photosynthèse, la respiration cellulaire et la fixation de l’azote.

1.2.3. Le phosphore et le monde vivant marin

  • Photosynthèse : composant essentiel des molécules ADN, ARN et ATP nécessaires à la photosynthèse pour produire les composés organiques indispensable à leur croissance et à leur développement.
  • Structure du plancton : Les niveaux de phosphore influencent la composition spécifique du plancton. Certains organismes planctoniques plus compétitifs dans l’absorption du phosphore impactent la structure globale du plancton dans un écosystème.
  • Biominéralisation : les phosphates sont essentiels à la minéralisation des structures biologiques. Par exemple :
    • Formation des coquilles et squelettes d’invertébrés marins : les ions phosphate sont des précurseurs clés dans la formation de carbonates de calcium et d’autres minéraux qui composent les structures minérales telles que les coquilles et les squelettes des mollusques, des échinodermes ou des coraux (cf. article Croissance du corail).
    • Minéralisation dans les tissus mous : le phosphore contribue également à la biominéralisation de structures dans les tissus mous des invertébrés, parfois à des fins de soutien structurel ou de protection. C’est les cas des sclérites des octocoralliaires (cf. article Octocoralliaires)
    • Structures de micro-organismes : les micro-algues unicellulaires diatomées biominéralisent des coques siliceuses, les frustules, qui les entourent et leur fournissent une certaine protection. Les foraminifères, protistes unicellulaires marins, sécrètent des coquilles calcaires complexes. De même
    • Nodules phosphatés : les sédiments marins des grandes profondeurs contiennent des agrégats riches en phosphore. Ils peuvent être partiellement remis en solution, à l’échelle de milliers d’années, avec une possible action bactérienne.
  • Activité bactérienne :
    • Niveau d’activité : le phosphore, tout comme l’azote, le fer et la lumière impacte l’évolution microbienne et son adaptation.
      Les mécanismes d’assimilation du phosphore varient d’une espèce à l’autre en fonction de leur adaptation à des environnements spécifiques. Par exemple leur activité évolue selon l’abondance en phosphore. En cas de carence, elles peuvent aussi intensifier leurs efforts pour capturer et assimiler ce nutriment essentiel. Certaines espèces se révèlent plus efficaces ou spécialisées dans certaines conditions. Le taux d’assimilation du phosphore varie aussi en fonction de leur croissance, la demande étant plus forte en phase de croissance. La présence d’autres composés dans le milieu peut influer, certains assimilés directement, d’autres peuvent nécessiter une hydrolyse préalable.
    • Minéralisation bactérienne  : les bactéries sont responsables de la décomposition de la matière organique, y compris les débris de plantes et d’animaux morts dans l’océan. Certaines bactéries sont solubilisatrices de PO4 (PSB), a priori non totalement spécialisées, et parfois accumulatrices de phosphates (PAB). Elles opèrent dans les sédiments profonds mais aussi près de la surface au sein du plancton. Durant ce processus de minéralisation, plus rapide qu’on le pensait elles libèrent du phosphore sous forme de composés inorganiques, principalement des phosphates de nouveau disponibles en solution. Elles sont ainsi, à la base de la chaîne alimentaire marine, contribuant à la production primaire en fournissant des nutriments essentiels au phytoplancton, aux algues et aux plantes marines.
    • Solubilisation des phosphates précipités : le phosphore est présent à la surface des roches sous forme de phosphate tricalcique : l’hydroxyapatite. Cette forme d’apatite est difficilement soluble dans l’eau expliquant en partie la faible quantité de phosphates dissous. Pourtant, dans le milieu naturel on assiste à une remise en solution. En effet, le pH s’acidifie : d’une part dans le milieu anoxique de sédiments profonds, et d’autre part les sécrétions acides des bactéries facilitent la dissolution du phosphate de calcium rendu de nouveau disponible dans le cycle biologique. Il en est de même de la dissolution des phosphates des os des animaux dont ces bactéries se chargent également.
  • Équilibre écologique : Le plancton occupe une position fondamentale dans la chaîne alimentaire. Le plancton, producteur primaire, est la base des nourritures de nombreux organismes pour pourvoir aux besoins des plus petits organismes herbivores jusqu’aux poissons, contribuant ainsi à l’équilibre écologique des écosystèmes aquatiques. La concentration en phosphore peut être un facteur limitant la croissance du plancton et des algues, localement ou géographiquement. Elle peut être aussi un facteur aggravant, au point de générer les pollutions que nous constatons épisodiquement sur nos côtes en présence d’engrais phosphorés.

1.2.4. Le phosphore et les coraux

Assimilation du phosphore par les coraux

Elle se réalise selon plusieurs voies : :

  • Adsorption à partir de l’eau de mer : les coraux sont en mesure d’adsorber les nutriments, y compris les phosphates. Soit directement à partir de l’eau de mer qui les entoure via la cavité gastrique, soit au travers des tissus membranaires, par voie intracellulaire ou para cellulaire.
  • Symbiose avec les zooxanthelles : les algues symbiotiques utilisent les phosphates dissous dans l’eau pour réaliser la photosynthèse et produire des composés organiques, dont une partie transférée aux coraux est source de nutriments .
  • Capture de particules organiques : les coraux capturent des proies, vivantes ou mortes, et des particules organiques contenant du phosphore provenant de la décomposition de matières organiques dans l’eau de mer.
  • Recyclage des déchets : les coraux peuvent recycler les déchets phosphorés issus de ses propres métabolismes et des zooxanthelles qu’il héberge.
Le phosphore dans la calcification du corail

La biominéralisation du squelette calcaire nécessite du phosphore dans un ratio calcium/phosphore permettant la précipitation efficace du carbonate de calcium. Il interagit avec d’autres éléments tels que le magnésium, le strontium et le fluor, qui peuvent influencer la formation des cristaux naissants et la structure du squelette calcaire. Un taux insuffisant peut limiter la calcification et la croissance du corail. Des mesures ont établi qu’un taux excessif conduit au ralentissement de la biominéralisation au dessus de 0,2 mg/l PO4, voire à son inhibition progressive à des taux excédant 2 mg/l PO4, selon de nombreux scénarios qu’il reste à démontrer. Il faut noter que, contrairement aux idées reçues, considérant le ratio squelette/biomasse des coraux hermatypiques, le besoin en phosphates pour calcifier est supérieur chez les SPS que les LPS.

2. En aquarium marin et récifal

2.1. Le cycle du phosphore en aquarium

Bien que les conditions ne soient pas celles du milieu naturel, en aquarium le phosphore suit un cycle similaire que Carlos Cabrera a résumé dans Le cycle aquatique du phosphore sur Cap Récifal.

2.2. Sources de phosphates dans l’aquarium

2.2.1. Sources de phosphates inorganiques (orthophosphates)

Sources habituelles

En aquarium, cette forme de phosphate directement assimilable par les coraux et autres organismes marins provient principalement de sources telles que :

  • Aliments secs pour poissons : La nourriture en flocons contient bien souvent environ 1 % de phosphore (3 % de phosphate). Il suffit de lire l’étiquetage pour s’en assurer. Cette seule source peut générer une augmentation progressive dépassant 0,4 mg/l. Ce taux ne sera pas celui mesuré dans l’eau si les poissons consomment ces aliments, mais il en résulte une production de déchets de dioxyde de carbone, de phosphate et d’azote (ammoniac, nitrite, nitrate, etc.). Le taux sera plus important si la population ne consomme qu’une partie des aliments.
  • Aliments divers : Les fruits de mer en conserve, surgelés ou parfois frais peuvent contenir des sels de phosphate inorganiques comme agents de conservation. Leur rinçage permet de réduire la charge introduite dans l’aquarium.
  • Eau du réseau : Quand elle est utilisée pour les changements d’eau, voire un système d’osmose non performant.
  • Phosphates précipités : Les ions calcium Ca2+ et les ions phosphate PO43- réagissent pour former un précipité solide de phosphate de calcium, sous forme de particules insolubles dans l’eau. La précipitation peut se produire dans l’eau, sous forme parfois visible de flocons blancs qui se déposent sur le décor, les coraux, les algues, ou bien à la surface de substrats calcaires (sable, roches, parois de l’aquarium…). Elle est favorisée par une alcalinité élevée (KH), un pH élevé (par exemple en sortie de réacteur à hydroxyde de calcium), une forte concentration en PO43- , le métabolisme des poissons, des plantes et des bactéries. Ainsi éliminés de la colonne d’eau, les phosphates peuvent se remettre en solution selon les conditions environnantes.
Relarguage de PO4 par les pierres du décor : mythe ou réalité ?

Dans des conditions particulières de saturation et de pH élevé le phosphate de calcium précipite sur les substrats calcaires sous forme d’hydroxyapatite. C’est une forme de phosphate de calcium très dure (un constituant des os et de l’émail des dents) et très peu soluble aux conditions normales de l’aquarium. Ainsi les pierres calcaires accumulent des phosphates issus de la colonne d’eau.

On sait que dans le milieu naturel, dans des conditions particulières d’acidification aidées par l’activité bactérienne, l’apatite peut être remise en solution, libérant des phosphates dans le cycle du phosphore. Ce phénomène a donné naissance à la croyance aquariophile que les pierres relarguent les phosphates accumulés. Qu’en est il ?

L’apatite commence à se dissoudre à partir de pH 7 et s’accèlère à pH 3, bien loin d’une eau récifale. Un tel pH peut s’obtenir dans le milieu anoxique des sédiments des grandes profondeurs océaniques.
Cependant, des études ont mesuré que le pH ne descend en dessous de 7,5 qu’au-delà de 5 mètres d’épaisseur. Cette situation ne se rencontre pas dans les quelques centimètres de sédiments d’un aquarium, surtout en mode Berlinois.

Une autre hypothès a été émise : les bactéries utilisent des enzymes phosphatases et produisent des acides organiques agissant comme agents chélatants en libérant les ions phosphate de l’apatite et devenant biodisponibles pour les organismes (algues, phytoplancton…). Ces bactéries sont donc en mesure de dissoudre le phosphate de calcium, d’accumuler les phosphates inorganiques pour les libérer dans de bonnes conditions, ou à leur mort. Cependant les travaux sur la biodisponibilité du phosphore sédimentaire tendent à conclure dans la plupart des cas la non biodisponibilité du phosphore apatique et à la biodisponibilité du seul phosphore non apatique. Il y a donc peu de probabilités de retrouver dans l’eau de nos aquariums des phosphates "relargués" par les substrats, issus de la pécipitation en hydroxyapatite sur le sable et les roches du décor.

Pour autant, nous pouvons bel et bien mesurer un taux de phosphate important, par exemple dégagé par des pierres sèches. Plus probablement, les pierres accumulent dans la durée des sédiments phosphatés, en grande partie organiques, déposés dans les interstices mais non chimiquement liés au substrat. Les méthodes visant maintenir un décor sain et à recycler des pierres usagées doivent prendre en compte cet aspect.

2.2.2. Sources de phosphates organiques

Il est difficile de mesurer le phosphore organique. En aquariophilie récifale il provient de sources identifiées :

  • Décomposition des particules organiques sédimentaires : les excréments de poissons, restes de nourriture, algues mortes, animaux et végétaux en décomposition etc. se décomposent dans les sédiments pour être plus tard reminéralisés par les bactéries en phosphates inorganiques biodisponibles.
  • Polyphosphates : présents dans certains additifs pour aquarium, ils se décomposent assez vite en phosphates inorganiques.

2.3. Consommations du phosphore en aquarium

Les processus de consommation et de transformation sont similaires à ceux déjà évoqués en milieu naturel.

2.4. Taux de phosphates, bioindicateurs

En aquarium récifal le contrôle des nutriments carbone, azote et aussi phosphore, est crucial pour maintenir un environnement viable pour les coraux et autres organismes marins. En carence, il peut être un facteur limitant le développement des organismes vivants. A contrario un excès de phosphore peut générer des problèmes.

2.4.1. Carence, taux mini, facteur limitant

Le phosphore est indispensable au développement des habitants de l’aquarium, mais le besoin est limité. Contrairement à l’objectif zéro phosphate autrefois préconisé, le taux devrait toujours se situer au minimum à un niveau plus que détectable. Compte tenu des fluctuations, nous visons un taux minimal 0,02 mg/l PO4 pour éviter des effets négatifs sur la croissance des tissus et au-delà, la santé et la faiblesse du corail face à d’autres agressions. La carence en phosphates est d’autant plus critique que le taux d’ammonium est faible. Dans l’impossibilité de puiser ses nutriments (ammonium) directement, le corail exploite les nitrates en extrayant des ions oxygènes réactifs très oxydants et sources de brûlures des tissus d’autant plus qu’ils sont exposés a la lumière directe.

Les carences sont détectables par :

  • Croissance des algues : En excès les algues consomment l’essentiel du flux de phosphates au point que les tests mesurent zéro.
  • Couleurs des coraux plus pâles : du fait des métabolismes moins performants, une photosynthèse ralentie
  • Croissance du corail ralentie : pour les mêmes raisons.

2.4.2. Excès, taux maxi, facteur aggravant

l’aquarium récifal est le plus souvent confronté à un taux excessif. De plus une prolifération d’algues peut masquer un flux important de phosphore traduit par un faible taux mesuré dans l’aquarium. En aquariophilie récifale, la concentration devrait se situer en dessous de 0,15 mg/l au-delà de laquelle on peut constater  :

  • Croissance des algues : En excès les algues filamenteuses, rouges… dont les indésirables, prolifèrent à un niveau parfois insoutenable pour les coraux et l’esthétique de l’aquarium. Elles procèdent par étouffement autant que par allélopathie, certaines algues perforatrices des coraux sont à l’origine de la fragilisation des squelettes. Leur développement naît en principe à leur source sur le sable ou le décor.
  • Inhibition de la biominéralisation : La calcification des coraux, des algues corallines, des oursins, des coques de gastéropodes… se trouve réduite, voire stoppée. Cette inhibition est particulièrement visible sur les coraux fins à pousse rapide tels que Sériatopora hystrix qui ne présente alors plus ses pointes acérées.
  • Fragilité du squelette : les scléractiniaires moins dense sont potentiellement plus fragiles.
  • Brunissement des coraux : L’excès de phosphate à cause du développement des zooxanthelles se traduit également par un brunissement des coraux.
  • Croissance des poissons : Elle est affectée dès 3 mg/l PO4.

2.4.3. Ratio azote N / phosphore P

Les tissus des êtres vivants se caractérisent par un ratio C/N/P en carbone, azote, phosphore dans leurs tissus, variable selon l’environnement. Ces éléments, mais ce ne sont pas les seuls, agissent ensemble. Par exemple il suffit d’une carence en phospore (facteur limitant), et le métabolisme des bactéries ne leur permet plus d’assimiler les nitrates. L’inverse est aussi vrai. S’écarter des ratios nuit à certaines espèces et profite à d’autres qui prennent l’ascendant. Cela se traduit, en aquarium récifal, par le respect d’un juste équilibre entre nitrates et phosphates de l’ordre de 100/1 à 150/1. Par exemple 0,05 mg/l PO4 et 5 à 7,5 mg/l NO3.

Un déséquilibre important de ce ratio, a fortiori s’il s’inverse avec un taux de phosphates supérieur à celui des nitrates, se manifeste par un développement d’algues indésirables, de cyanobactéries et à terme, de dinoflagellés. Et nous l’avons tous constaté à nos dépends : des déséqulibres chimiques, même résolus, peuvent en entrainer d’autres, biologiques, bien plus difficiles à solutionner.

Pour mémoire, ce ratio est expérimental et ne doit pas être confondu avec la valeur du rapport de Redfield N/P 16/1 lequel, rappelons-le, concerne la moyenne relevée spécifiquement dans le phytoplancton océanique. De plus ce dernier exprime un rapport molaire (16 atomes N pour 1 atome P). Le ratio de Redfield des deux composés exprimés en mg/l serait 7/1.

3. Mesurer les PO4

La gestion des phosphates doit bien considérer que la mesure du taux de phosphates inorganiques dissous dans l’eau ne reflète qu’une partie du flux global. En effet les végétaux, sédiments, précipitations, dissolutions… contribuent au cycle, en absorbent une partie pour en remettre dans le circuit. C’est ainsi que l’on peut avoir un développement algal même avec peu de phosphates mesurés. Cette part est invisible par les tests classiques et parfois suffisamment importante pour impacter le cycle dans l’aquarium. Ainsi on peut vérifier le taux de phosphates dans l’eau mais aussi sur les éléments du décor.

3.1. Tester les PO4 fixés sur le sable et les roches calcaires

On peut vouloir tester les substrats calcaires, soit que l’on doute, soit que l’on souhaite recycler des pierres usagées. Personnellement, je réalise un test colorimétrique d’une eau mise en contact avec le substrat (sable ou pierres), dans des proportions réalistes :

  1. Préparer un volume d’eau salée fraîchement préparée, exempte de phosphates.
  2. Introduire un volume de sable (ou pierre) sec, correspondant à celui de l’aquarium. Par exemple 15 mm dans un récipient de 20 cm de hauteur si on prévoit 4 cm dans un aquarium de 55 cm de hauteur d’eau.
  3. Agiter fortement
  4. Laisser décanter plus de 2 h.
  5. Réaliser le test colorimétrique.

La méthode thermique Fauna marin consiste à réaliser un test colorimétrique sur de l’eau du bac chauffée proche de l’ébullition et le comparer avec le test sur l’eau issue directement du bac pour en déduire un "facteur de dépôt".

3.2. Tester les PO4 dissous dans l’eau

Les tests colorimétriques classiques du hobby permettent d’évaluer l’évolution de la teinte de l’eau après formation d’un complexe coloré avec des réactifs spécifiques.  Ils ne mesurent que les orthophosphates (inorganiques) dissous qui ne reflètent qu’une portion des phosphates en excluant les formes inorganiques non dissoutes et organiques. Il existe des test phosphates organiques cependant relativement complexes et coûteux.

Tests colorimétriques

Salifert Profi test 0,18/test

RedSea 0,23/test

Aquaforest 0,45/test

Aquarium system 0,40€/test

 

Les photomètres procèdent du même principe que les colorimètres sauf que l’analyse de la coloration n’est pas visuelle mais résulte de la mesure de l’intensité lumineuse résiduelle, non absorbée, d’un faisceau lumineux après avoir traversé l’échantillon. L’appareil produit un spectre rayonnant adapté et une échelle de mesure calibrée pour chaque type de produit. Les modèles diffèrent par leur sensibilité et le protocole de mesure.

Photomètres pour aquariophilie eau de mer
Ancien photomètre Hanna
Hanna HI97105 Multiparamètres eau de mer
Hanna Checker ULR  HI774
Milwaukee MW12  

 

L’analyse par spectrométrie de masse à plasma à couplage inductif (ICP-MS), technique analytique puissante et précise permet de déterminer la concentration d’éléments présents dans un échantillon d’eau de mer à très faibles concentration. La limite de détection du phosphore est environ 0,2 µg/l. L’ICP mesure l’élément phosphore, qu’il soit sous forme organique ou inorganique. La différence avec un test phosphate permet de déduire la part organique.

4. Prévenir et maîtriser les phosphates

Avant de poursuivre, il faut bien être conscient que toute modification du taux de phosphate, de quelque manière que ce soit, impacte l’ensemble du système. Il convient de procéder méthodiquement et progressivement, en mesurant les nutriments qui peuvent évoluer vite, et en observant la réaction des invertébrés qui évolue plus lentement, à l’échelle de quelques semaines. En effet, l’activité bactérienne et les algues s’adaptent, avec eux les nitrates, les oligoéléments évoluent, de nouveaux équilibres biologiques s’installent, avec quelques réactions chimiques. Aussi, les actions sur les phosphates ne devraient se limiter qu’au juste nécessaire pour retrouver une situation stable, sans perfusion.

4.1. Augmenter le taux de phosphates

En principe on ne supplémente pas le phosphore régulièrement. Les phosphates étant un élément essentiel d’un système équilibré, ils doivent être naturellement stables. Afin d’obtenir un taux minimum vital, il est parfois nécessaire d’augmenter ponctuellement le taux de phosphates, notamment dans les aquariums très peu peuplés en poissons. Cette opération doit, bien entendu, se réaliser sous contrôles réguliers.

  • Additifs phosphatés commerciaux : les suppléments (phosphate de sodium, de potassium, sels de phosphate divers, acide phosphorique), souvent dénommés "phosphate plus", permettent d’augmenter les phosphates dans les aquariums récifaux. Généralement disponibles sous forme de solutions liquides ou de poudres, doivent être dosés strictement et conformément aux instructions du fabricant.
    Des substrats nutritifs permettent de libérer lentement des nutriments, y compris des phosphates, dans l’eau au fil du temps. Utilisés comme engrais pour les aquariums d’eau douce plantés, il n’existe pas à ce jour de produit similaire pour l’aquarium récifal.
  • Solution phosphatée DIY : réaliser une solution selon le calculateur Calculateur Supplémentation avec l’un des produits suivants. Par exemple 1 ml d’une solution à 0,1 % de PO4 augmente les PO4 de 10 µg/l dans 100 litres d’eau de l’aquarium :
    • Dihydrogénophosphate de potassium (monopotassique) : diluer KH2PO4 à raison de 1,43 g/l d’eau osmosée.
    • Hydrogénophosphate de potassium (dipotassique) : diluer K2HPO4 à raison de 1,83 g/l d’eau osmosée.
  • Alimentation plus importante  : Augmenter la quantité, la fréquence et la variété d’alimentation des poissons et des invertébrés avec des aliments riches en phosphates.
  • Réduire l’éclairage  : cela réduit la croissance des algues consommatrices de phosphates, si elles sont déjà présentes. Une méthode à éviter dans le cas contraire.
  • Réduire les changements d’eau  : Pour ainsi accumuler les déchets organiques.
  • Réduire l’écumage : afin de moins exporter les bactéries assimilatrices de phosphates. Les phosphates organiques resteront dans le circuit pour être plus tard minéralisés en phosphate inorganique dissous.
  • Réduire ou supprimer tout traitement antiphosphate : c’est une évidence.

4.2. Diminuer les phosphates

La réduction des phosphates procède différemment selon que l’on vise les phosphates inorganiques ou organiques dissous.

4.2.1. Précipiter les orthophosphates inorganiques

Le phosphore se lie très facilement à de nombreux éléments. En présence de calcium il se forme un phosphate de calcium Ca3PO42, l’hydroxyapatite (présente dans nos os et dents), un composé très dur et insoluble. La précipitation se produit plus aisément en présence d’alcalinité KH, pH et PO4 élevés. L’apatite précipite dans la colonne d’eau sous forme de flocons que l’on peut extraire par la filtration et également par écumage quand les flocons s’enrobent de matières organiques. Le phosphate de calcium se lie aussi aux substrats calcaires (sable, roche). Il est alors difficilement soluble et il y a peu de risque à le retrouver solubilisé dans l’eau.

Quelques principes pour la précipitation des phosphates :

  • Précipiter avec hydroxyde de calcium : on peut volontairement et efficacement provoquer la précipitation à la sortie d’un réacteur à hydroxyde de calcium (RAH) où les conditions de sursaturation sont réunies. Ce ne sera pas le cas à la sortie d’un réacteur à calcaire (RAC) du fait du pH plus faible lié au CO2.
  • Précipiter avec des additifs de nature à augmenter pH et carbonates.
  • Filtrer les floculations : issues de la précipitation naissante dans la colonne d’eau.
  • Maintenir pH et KH : conserver des valeurs de pH et alcalinité KH à un niveau stable et suffisant 8 dKH et 400 mg/l Ca pour limiter le risque de remise en solution.

4.2.2. Limiter pollueurs et pollutions

  • Population de poissons adaptée : Le métabolisme de poissons de grosse taille ou surpeuplé produit des déchets qu’il faut traiter.
  • Nourriture adaptée : c’est une des causes principales. Toute nourriture introduite dans le bac est source de pollution. Réduire l’apport de nourriture et, si besoin, rincer la nourriture congelée à l’eau du robinet dans une épuisette fine. Une simple boîte d’artémias vivants contient un taux de phosphates de 2 mg/l, soit 0,12 mg par boite de 60 cl. Ce n’est rien considéré au volume du bac, mais jour après jour… Les coraux eux, devront être nourris spécifiquement en limitant la dissémination de nourriture liquide dans l’eau.
    Il faut toutefois noter que l’apport de PO4 par le biais de nourritures congelées peut être parfois nécessaire au développement de la microfaune et des bactéries bénéfiques dans le cycle du phosphate. L’observation du bac conduira à la meilleure attitude.
  • Eliminer les déchets, réduire les sédiments : vérifier l’absence de décès chez les poissons ou les détritivores. Eliminer les algues en décomposition, elles relâchent des minéraux sources de phosphate. De la même manière, élaguer le refuge algal.
    La population de détritivores nettoie les substrats et remet en suspension les sédiments riches en phosphore.
  • Brassage, débit d’eau : dans cette logique le brassage permet de décoler et maintenir les sédiments dans la colonne d’eau et la circulation de les évacuer vers la cuve de traitement.
  • Chaine alimentaire : assurer la continuité de la chaine alimentaire vers les microorganismes (détritivores, méiofaune, bactéries) de manière à réduire progressivement les déchets.
  • Filtration mécanique  elle extrait les déchets organiques avant leur décomposition.
  • Eau de complément : privilégier l’eau correctement osmosée à l’eau du réseau ou de source aux taux de phosphates aléatoires. Même à taux très faible les phosphates peuvent s’accumuler pour atteindre des taux élevés.
    Augmenter la fréquence ou le taux réduit provisoirement les phosphates en solution, le temps de trouver un équilibre.
  • Sel de préparation et additifs : des sels de mauvaise qualité, et certains kits de supplémentation contiennent des phosphates.
  • Granulat calcaire du RAC : à part le carbonate de calcium synthétique (Calcialith), les granulats calcaires naturels contiennent plus ou moins de phosphate. Le RAC même s’il apporte calcium, strontium et magnésium peut à son faible pH, avec un granulat de mauvaise qualité, dissoudre et libérer les phosphates liés au substrat. il convient d’éliminer les éventuels bris de coquilles.

4.2.3. Déphosphater sable et pierres

Les sables calcaires grossiers issus de squelettes coralliens contiennent tous du phosphate en quantité variable. Les sables d’aragonite fins en sont normalement dépourvus tout comme les carbonates de calcium synthétiques (Calcialith…). Les coquilles de mollusques sont elles, fortement chargées. Avant d’introduire un sable, il est préférabble de vérifier et, si besoin trier manuellement tout ce qui ne semble pas calcaire.

L’accumulation et la fixation des phosphates sur le sable s’établit au cours du temps. En effet, le sable calcaire facilite la coprécipitation de phosphate de calcium à sa surface. L’eau de l’aquarium étant assez chargée en phosphate (par rapport à l’eau naturelle) une quantité de précipité s’accumule sur chaque grain de sable.

4.2.4. Réduire les phosphates par voie biologique

Nopox de RedSea

Cette voie consiste à exploiter l’aptitude des organismes vivants à assimiler le phosphore sous forme organique et les extraire à leur décès, avant qu’ils ne deviennent disponibles dans l’eau sous forme inorganique.

Microfaune

La microfaune, le zooplancton, le phytoplancton… assimilent les phosphates et seront éliminés à leur mort par décantation, siphonage et écumage.

Bactéries accumulatrices de phosphates (PAB)

Les PAB accumulent le phosphate dans leurs cellules, au-delà de leurs besoins immédiats comme nombre de bactéries, généralement sous forme de polyphosphates, plus ou moins selon l’espèce, et parfois selon l’environnement. Cette réserve leur est utile pour répondre à des besoins divers : stockage d’énergie, réserve de nutriments, adaptation aux fluctuations et stress environnementaux. On a donc avantage à entretenir la population et la diversité du spectre bactérien par ajouts occasionnels de bactéries diverses, voire issues du milieu marin, par l’entretien de la masse bactérienne, en assurant la disponibilité en nutriments C/N/P.

En général il suffit d’ajouter du carbone, l’azote et le phosphore étant largement disponibles. Ceci peut se réaliser directement dans l’aquarium ou mieux, de façon plus maitrisée, dans un réacteur à bactéries (RAB). Les apports de carbone organique sont assurés par l’ajout d’alcool, d’acides, de sucres… tels que vodka, vinaigre, sucre (méthode VSV), ou de solutions du commerce telles que NO3-PO4-X de RedSea. Comme l’explique Sharon Ram dans la publication RedSea, le Nopox contient plusieurs composants carbonés ainsi que des cofacteurs enzymatiques indispensables au métabolisme des bactéries et propres à développer des PAB. Les biofilms générés, riches en phosphore, finissent par se désolidariser du substrat pour être efficacement éliminés par écumage.

On veillera dans ce processus à ne pas réduire trop rapidement les nitrates par rapport aux phosphates au risque de voir se développer des cyanobactéries. Certaines bactéries se développent plus ou moins selon le type de carbone. On évitera les préparations personnelles qui s’écarteraient trop des standards de manière à ne pas risquer de privilégier des bactéries pathogènes.

Cultures d’algues

Les végétaux utilisent les phosphates comme engrais. Les algues supérieures, cultivées dans un refuge à algues, permettent d’absorber quantité de nutriments en plus d’établir une faune indispensable au cycle du phosphore. Ce processus impose quelques précautions :

  • Elaguer régulièrement les algues avant leur décomposition pour exporter nitrates et phosphates.
  • Maitriser les autres nutriments influents (azote, fer…).
  • Le refuge algal devient un facteur aggravant quand le taux de phosphate est faible.
  • La lyse de certaines algues (caulerpes) lors de leur reproduction, povoque une augmentation de phosphates. L’écumeur doit être réactif.

4.2.5. Ecumer les matières chargées de phosphore organique

L’écumeur correctement dimensionné est quasiment le seul moyen de traiter les phosphates organiques. Il permet d’exporter les organismes (bactéries, microfaunes, vivantes ou mortes, excrétions…) ayant accumulé du phosphore, avant qu’ils se décomposent en phosphate, nitrate, sulfate, etc. Bien sûr, sous réserve que le spectre bactérien contienne des espèces bactériennes fixatrices ou accumulatrices de phosphates. Les orthophosphates inorganiques quant à eux, ne peuvent être évacué par ce système, leur charge ionique ne permettant pas une attraction à l’interface air/eau.

4.2.6. Traiter avec des anti phosphates

Liants métalliques divers

Dans l’eau, les ions phosphate peuvent se lier à divers ions métalliques pour former des précipités ou des complexes solubles. Certains métaux réagissent plus facilement avec les phosphates que d’autres, tels que les phosphates de calcium, de fer, de magnésium, etc.
Parmi les composés destinés à lier les phosphates : le chlorure ferrique, le chlorure de lanthane, le sulfate d’aluminium, l’alun un sel d’aluminium et de potassium floculent les phosphates qui peuvent être éliminés par l’écumeur, parfois enrobés de matière organiques. Le commerce aquariophile n’identifie pas de tels produits pourtant communs dans les systèmes de traitement des eaux.

  • Chlorure de lanthane : les ions lanthane réagissent pour former un précipité insoluble de phosphate de lanthane sous forme de floculats extraits par l’écumeur, la filtration mécanique ou la décantation. Le chlorure de lanthane doit être injecté avec un système de mélangeage et très régulièrement pour assurer une parfaite filtration dès la floculation et de manière maitrisée, le lanthane devenant toxique pour les invertébrés par bioaccumulation ou accumulation dans les sédiments. Certains commerçants ne semblent pas s’inquiéter de ce risque dans leurs préconisations. Parmi les produis : Tridacna lanthane, Grotech Remophos, Colombo Phosphate algae EX et potentiellement Salifert Phosphate eliminator dont je retiendrai la bonne efficacité, notamment en présence de taux élevés de PO4. La société Neo3plus propose un équipement pour délivrer le chlorure de lanthane en toute sécurité.   
  • Oxydes ferriques granulaires (GFO) : Star du traitement anti phosphate par sa simplicité et efficacité. Les ions négatifs des phosphates se lient aux ions positifs des oxydes ferriques. L’adsorption du phosphate se poursuit jusqu’à saturation des liaisons. Il convient d’oter le média après un laps de temps qui dépend de la concentration en PO4. Les réactions peuvent également produire des précipités insolubles éliminés par filtration mécanique et décantation.
    Ce produit, de couleur brun rougeâtre à presque noir, peut conduire à une augmentation du taux de fer dans l’eau, apparemment sans effet négatif sur le développement des algues, l’effet antiphosphate prenant le dessus. Il s’avère également susceptible de relarguer une partie de ce qu’il a adsorbé. Il convient de ne pas laisser le média dès qu’il a perdu son efficacité. On a pu lui reprocher des précipitations locales de carbonate de calcium à proximité. La prudence conseille de ne pas laisser le média à côté de pompes surtout avec un KH élevé.
    Le commerce dispose de nombreux oxydes ferriques : hydroxydes de fer Rowaphos de Rowa, PowerPhos Fauna marin, Microbe Lift Phos-Out 4, Colombo Phosphat minus et PhosEx Ultra de JBL… qui propose une version pour bassin, économique et performante en récifal. Tous ces produits ne sont pas égaux, ils se différencient par la granulométrie des grains et surtout, certains contiennent une proportion non négligeable de fines poussières susceptible de se déposer sur les décors et animaux sessiles. Le rinçage préalable des granulés, de préférence à l’eau salée, est impératif.
  • Paille de fer : Pour mémoire, on peut citer la paille de fer, autrefois utilisée de manière très efficace, déposée dans un panier ouvert, non percé, dans la cuve technique. Son action rapide peut blanchir l’eau les premières heures puis s’éclaircir, sans incidence néfaste sur l’équilibre de l’eau. L’inconvénient majeur est l’oxydation rapide des fibres métalliques et la limaille que l’on retrouve dans l’aquarium, noircissant le décor si l’on n’a pas pris la précaution d’interposer des filtres mécaniques. Les granulés GFO ont été de ce point de vue une avancée appréciée.
  • Oxydes d’aluminium : également très efficace les oxydes ou hydroxydes d’aluminium procèdent du même principe que les oxydes métalliques. Puissant antiphosphate, il agit en quelques jours. A placer dans une chaussette en aval de l’écumeur (il nuit à son fonctionnement). Retirer lorsque le l’objectif est atteint, l’élément aluminium introduit dans l’eau devient toxique au-delà d’un certain seuil. Des aquariophiles ont relaté une irritation des coraux par du produit non dissout. Les oxydes ferriques ne présentent pas de tels risques. Suivre également une éventuelle chute du potentiel Redox. Parmi les produits du commerce : Phosguard de Seachem, Microbe Lift Sili-Out 2…
Zéolithes (silico aluminates)

Bien que n’étant pas utilisées lors de traitements antiphosphate, elles contiennent de l’aluminium en mesure d’en adsorber lentement.

Charbon actif

Le charbon actif adsorbe les phosphates en surface, comme de nombreux composés. Son efficacité dépend du type de charbon actif utilisé et de la concentration de phosphates dans l’eau, rapidement saturé à forte concentration. Sélectionner un charbon actif certifié sans phosphates. On peut tester le charbon après trempage d’une petite quantité dans une eau déminéralisée.
Bien que ce ne soit pas le meilleur moyen d’éliminer les orthophosphates inorganique, il a l’avantage de fixe efficacement les matières organiques contenant du phosphate (phospholipides).

Polymères organiques

Dits séquestrants ou agents de complexation, ils agissent en formant des complexes avec les ions phosphate, réduisant ainsi leur concentration dans l’eau : polyacrylates ; polyphosphonates, polymères naturels (chitine) ; polyamines, polyéthylèneimine… Leur efficacité reste à démontrer sur les orthophosphates. Les polyelectrolytes cationiques sont utilisés pour améliorer la floculation en complément des coagulants métalliques semblent plus efficaces. Ils sont parfois associés à des contre-ions tels que les chlorures (Cl⁻) ou les sulfates (SO42-) pour une meilleure solubilité dans l’eau.

Résines échangeuses d’ions

Polymères de synthèse, elles éliminent les phosphates de l’eau par échanges d’ions, comme leur nom l’indique. En aquariophilie, compte tenu de la charge en composants de l’eau de mer, elles seraient très rapidement saturées. On les réserve donc au traitement de l’eau douce après osmose.

 

Produits anti phosphates

Rowaphos de Rowa, oxyde ferrique

PhosEx de JBL, oxyde ferrique pour les bassins mais aussi le récifal

Phosguar, oxyde d’aluminium 

Salifert Phosphate eliminator, un floculant très efficace.

5. Synthèse de la maintenance des phosphates

Pour clore cette publication, ce tableau résumé.

Tableau 1 : Phosphates en aquarium récifal
Taux Normal : 0,02 à 0,15 mg/l avec ratio N/P 100-150/1
Carence Excès
non détectable > 0.15 mg/l
Bio indicateurs
  • Forte présence d’algues.
  • Affaiblissement du corail
  • Perte de couleurs, éclaircissement, d’autant plus que le milieu est oligotrophe (C/N/P faibles)
  • A l’extrême, nécroses des coraux.
  • Croissance des algues (algues filamenteuses et diverses)
  • Développement de cyanobactéries
  • Croissance du squelette corallien diminuée voire stoppée
  • Squelette plus fragiles.
  • Brunissement des coraux par le développement des zooxanthelles.
Causes
  • Consommation importante par les algues
  • Activité bactérienne soutenue.
  • Forte extraction par l’écumeur.
  • Extraction par des traitements (zéolithes, anti silicates…)
  • Alimentation en excès ou phosphatée
  • Surpopulation 
  • Rupture chaine alimentaire (bactéries, méiofaune…) 
  • Sédiments (brassage…  
  • Eau des changements
  • Additifs impurs
  • Dissolution substrats (acidification locale)
Actions Remonter  le taux

  • Ajouter un additif phosphaté.
  • Alimenter plus.
  • Réduire l’écumage.
  • Réduire l’éclairage.
  • Réduire les changements d’eau.
Réduire le taux

  • Écumer.
  • Précipiter les phosphates (hydroxyde de calcium…).
  • Traiter aux antiphoshates.
  • Nettoyer sédiments.
  • Alimenter moins, mieux.
  • Déphosphater les substrats (sable, roches).
  • Changement d’eau partiel. 

 

Bonne lutte !

6. En savoir plus

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