Eclairage LED 600W DIY pour aquarium récifal

Eclairage LED 600W DIY pour aquarium récifal

Auteur

Publié

L’éclairage d’un aquarium sublime la beauté des coraux et des poissons mais plus encore, il est indispensable à la santé des organismes photosynthétiques. Les rampes LED se distinguent sous de nombreux aspects, notamment leur capacité à fournir un spectre lumineux précis, adapté aux besoins de chaque espèce. Le commerce propose de nombreuses solutions, qui nécessitent un budget conséquent. Pourquoi ne pas en créer cet éclairage sur-mesure, adapté à l’aquarium et ses habitants ? Cet article développe les étapes de réalisation d’une rampe LED personnalisée, depuis la conception jusqu’à l’installation finale en passant par le choix des composants, le câblage, l’automatisation.

1. Cahier des charges

La technologie LED s’impose, compte tenu de ses avantages :  efficacité énergétique, longévité, cout de maintenance, légèreté, encombrement, personnalisation…)

Fig. 1: Projet de rampe dans le contexte.
  • Besoin des coraux
    • Spectre lumineux : celui nécessaire à la photosynthèse soit le Rayonnement Photo-synthétiquement Actif (PAR)
    • Densité photonique et spectre : pour un biotope représentant la pente récifale, depuis des fonds de 15 mètres à la crête récifale, pour une population de coraux mous (octocoralliaires) aux dur (SPS, LPS)
    • Eclairage temporaire excitant la fluorescence des coraux.
    • Lune : éclairage lunaire pour la tranquillité des poissons la nuit
    • UV : pour exciter des pigments particuliers
  • Besoins de l’aquarium
    • Adapté aux dimensions : 180 x 90 x 65 cm (1000 litres).
    • Notamment sa hauteur 65 cm et 63 cm de profondeur d’eau.
  • Besoins de l’aquariophile
    • Pratique :
      • Réglable en hauteur pour ajuster la hauteur de la source de lumière, introduire de gros volumes (PV, piège à poisson…).
      • N’encombrant pas les accès au quotidien (nettoyage, interventions).
      • N’éclairant pas en dehors de l’aquarium et les vitres le moins possible.
    • Pilotable à distance (Smartphone).
    • Réglage des lumières :
      • Ensemble de la rampe : la photopériode avec variation possible de l’éclairement au changement de journée.
      • Localement : orientation de la source de lumière, spectre et puissance lumineuse avec une marge supérieure de réglage pour tenir compte des inconnues.
    • Sécurité électrique : éclairage si dysfonctionnement sur le réseau d’habitation.
    • Esthétique : pas trop massive comparativement aux anciens HQI, dans l’esprit du meuble de l’aquarium, sans câble visible issu du plafond ou d’ailleurs.

2. Conception et choix techniques

2.1. Production de lumière

Les simulations de puissance, spectre lumineux et répartition ont été réalisées avec les géniaux modules de calcul d’éclairage Angles, Led wizard et Cree power RV Reef tool.

Répartition de l’éclairage

10 spots paraissent un compromis pour éclairer toute la surface (figure 1) à moindre coût et complexité, tout en conservant une lumière pas trop diffuse, de type rayons du soleil. Un éclairage par spot permet de proposer une lumière adaptée en puissance et spectre bleu/blanc sur sa zone éclairée. Les spots sont légèrement inclinés vers l’intérieur (figure 2) pour ne pas éclairer inutilement l’extérieur, ni les raidisseurs et peu les vitres.

Spectre lumineux

L’objectif de simuler une profondeur jusqu’à 15 mètres en mer correspond à une température de couleur réglable de 6500 à 20000K. La simulation oriente vers un mélange de LED blanc froid 6500K et bleu 450 nm. La profondeur moyenne 6 mètres correspond à une température de couleur 12000 K soit une proportion 60% de bleu et 40% de blanc comme le montre la figure 4. Ce spectre couvre l’étendue des longueurs d’ondes nécessaires à la photosynthèse (PAR) de 400 nm bleu à 700 nm rouge (figure 3), et à l’excitation des divers pigments notamment pour faire la ressortir la fluorescence. Le choix de conserver un spectre étendu et non pas spécifiquement très bleu est également motivé par le fait que des invertébrés, autres que les coraux photosynthétiques, ont peut-être des exigences différentes. J’ai tenté de simuler l’éclairement du soleil dans la profondeur souhaitée.

Quantité de lumière

Pour répondre à l’ensemble des coraux hébergés l’objectif de densité de Flux Photonique Photosynthétique (PPFD) est fixé à 100 µmol/s/m2 dans les parties basses, à 500 µmol/s/m2 à la surface. Compte tenu d’une marge de 20 % intégrant les incertitudes diverses, l’objectif est théoriquement atteint avec 10 spots de 60 W et donc une rampe de 600 W. Pour ce, les LED sont choisies pour fonctionner à une puissance électrique de 3 W comme on le verra.
Soyons clairs, le PPFD ne représente que la densité de photons et en rien l’énergie reçue par les organismes, laquelle dépend aussi de la longueur d’onde du photon considéré. Observons la figure 4. La surface cumulée des courbes 1 et 2 représente la couverture photonique du canal blanc. La surface 6, celle du canal bleu. Cette dernière est certes moins importante mais elle concerne les ondes bleues plus énergétiques. Il est fort probable que tout mesuré, la production d’énergie soit finalement très similaire entre le canal bleu à 100 % et le blanc à 100 %.

Choix des caractéristiques de la lumière
Fig. 2: Répartition de l’éclairage.
Fig. 3: Inclinaison des spots.
Fig 4: Spectre obtenu avec les choix de LED.

2.2. Composants de l’éclairage principal (spots)

Multiships

Cette puissance aurait pu être obtenue avec 200 LED unitaires avec le double de soudures et un enchevêtrement de fils. Ca tombe bien, le désir de réaliser des spots permet d’utiliser des assemblages de puces (chips) : les multichips. Pour un meilleur mixage des couleurs, chaque spot délivrera les couleurs blanche et bleue. Le multichip 60 W sera donc constitué de 2 lignes pilotées indépendamment l’une de l’autre, chacune de 10 LED de 3W. Soit une source de 30 W bleu et une autre de 30 W blanc. Le multichip est donc constitué de 20 puces LED réparties spécifiquement (figure 5). N’étant pas disponible sur le marché européen, notre ami Ali a bien voulu m’en réaliser sur mesure (figure 5). Ouf, je vois qu’à la rédaction de cet article le tarif a pris 30 % en 3 ans !
Les puces sont des Cree XPG3 6500K (blanc) et Cree XTE Royal blue 450nm (bleu). La tension mini. de déclenchement d’une puce est environ 3 volts. Ces références acceptent un courant de 1,5 ampère elles fournissent alors environ 4,7 watts. Mais je les utiliserai en deçà de leurs possibilités, soit avec un courant 1 A. Elles produiront alors chacune une puissance de 3 W, soit 60 Watt par spot. Le compte est bon.

Refroidissement

Un tel assemblage de 20 puces chauffe énormément, d’autant plus qu’elles sont rapprochées. La chaleur dégagée à leur base doit être évacuée rapidement au moyen d’un dissipateur. Le dimensionnement du dissipateur se calcule selon qu’il s’agit d’un modèle passif ou refroidi par un ventilateur (ventirad). N’ayant pas assez de recul sur les derniers modèles performants, passifs, à aiguilles, j’ai opté pour des Ventirad 80x68x40 (figure 7) adaptés à ces puissances. Le ventilateur assez bruyant a été remplacé par un modèle plus silencieux Arctic F8 PWM (figure 8) 12V, 0,3 Sone, 22,5 dB, 80 mm, 2000 t/mn, 47m3/h, environ 0,2 A. Et PWM, c’est à dire avec un fil supplémentaire pour les dimmer (varier la puissance) par microprocesseur.

Optique

Lors des premiers tests, les lentilles de 40 mm de piètre qualité s’avèrent générer des distorsions lumineuses. Je les ai remplacées par de plus grandes lentilles 67 mm 90°. L’angle de diffusion est un point important : trop petit il peut générer des points chauds et brûler les coraux. Trop grand on perd l’effet spot. 90° s’avère un minimum pour obtenir certaine diffusion. Les mesures au quantum-mètre on révélé un faisceau "spot" plus directif que souhaité. En effet, les mesures de la PPFD entre deux sources d’éclairage diminuent assez vite. Aujourd’hui je viserais probablement 120°.

Alimentation électrique

Par sécurité, les canaux (bleu et blancs) de l’éclairage sont répartis sur deux alimentations, elles même sur deux lignes indépendantes avec chacune un disjoncteur modulaire 10A dédié et des interrupteurs différentiels 30 mA. Le montant métallique est relié à la terre. La conception de la rampe interdit sa chute dans l’eau de l’aquarium.

La tension d’alimentation de chaque puce est cruciale. Elle doit être juste suffisante pour atteindre le seuil de déclenchement de la puce en dessous duquel elle ne s’allume pas, et ne pas trop s’en éloigner sous peine de destruction rapide. La marge est très faible, aussi il est d’usage de réguler le courant plutôt que la tension. On choisit donc des alimentations à courant constant.
Chaque alimentation sert 10 canaux, chacun sous 3 volts. C’est à dire 30 volts auxquels il faut ajouter 10 % pour compenser les pertes du circuit (longueur des câbles…), soit 33 volts. Chaque canal est constitué de 10 puces LED auxquelles il faut fournir 1 ampère, soit 10 ampères. Mon choix se porte sur deux alimentations 36V 10A 360W (figure 10) ventilées, à courant constant. Ces alimentations proposent une vis pour un léger réglage de la tension que l’on peut ajuster à 33 V en cours de fonctionnement. Plutôt que des modèles haut de gamme, je choisis des références asiatiques cinq fois moins chères, je peux ainsi acquérir un modèle supplémentaire pour réagir instantanément en cas de panne. Avec le recul ce choix s’avère satisfaisant. Le ventilateur de refroidissement de ce type d’alimentation est cependant bruyant, il convient de les déporter dans un local technique à un emplacement aéré. Simple prise de précaution, j’ai rajouté un ventilateur de PC 12 V sur programmateur pour mieux les aérer en période estivale.

L’alimentation délivre certes un courant constant de 10 A, mais il se répartit sur 10 lignes de 1 A. Pour les raisons ci-dessus le courant de 1 A doit lui aussi être régulé. Pour ce, on utilise un driver 1000 mA. Comme il me permettra de piloter la puissance des spots et qu’il sera soudé sur une carte, je choisis le modèle driver Meanwell LDD 1000H (figure 11) dimmable en PWM par µprocesseur avec cosses soudable.

Choix des composants.
Fig. 5: Répartition de l’éclairage.
Fig. 6: Multichips 60W.
Fig. 7: Ventirad.
Fig. 8: Ventilateurs.
Fig. 9: Optiques 67mm et réflecteurs.
Fig. 10: Alimentation 36V 10A.
Fig. 11: Driver 1000mA.

2.3. Lignes lune et UV

Fig. 12: LED et dissipateurs UV et lune

Deux lignes supplémentaires sont dédiées aux UV et à l’éclairage lunaire. Les LED UV 420 nm 3W et les LED bleues 450 nm (figure 12) sont toutes deux pilotées en puissance sur sortie PWM de l’Arduino. Elles sont basées sur le même principe de calcul, avec des alimentations édaptées. Les choix et le câblage sont détaillés dans le schéma électrique (figure 22).

3. Réalisation de la rampe

Grille titre
Projet de rampe.

3.1. Support de rampe

Le support est réalisé en tubes carrés soudés en deux parties. La partie supérieure en tube 30 mm soutient la galerie. La partie inférieure consiste en 2 tubes de 40 mm, fixés par des pattes soudées, sur les pieds du meuble, dans lesquels coulissent les montants verticaux de la partie supérieure. Des goupilles insérées dans les perçages des montants, tous les 5  cm, déterminent la hauteur de la galerie. Le support est percé de deux lumières d’entrée et de sortie des câbles électriques circulant dans les tubes. Le métal est protégé par deux couches de peinture antirouille.

Eléments du support de rampe
Fig. 13: Vue d’ensemble
Fig. 14: Support de rampe.
Fig. 15: Détails.

3.2. Galerie d’éclairage

Il s’agit d’un coffre, ouvert en partie haute pour une meilleure aération, fixé sur le cadre horizontal métallique. Ses dimensions sont inférieures de 10 cm à celles de l’aquarium pour un accès plus facile au quotidien. La partie inférieure en contreplaque 8 mm est percée de 10 trous destinés au passage des spots.

3.3. Spots

Les multiships sont appliqués sur les dissipateurs avec un intercalaire de pâte thermique, conductrice. Par sécurité, j’ai préféré les visser plutôt qu’un collage moins fiable dans la durée. Les spots sont constitués de carters imprimés en 3D, légèrement inclinés de 17° vers l’intérieur du volume d’eau, dans lequel viennent se positionner les ensembles ventirads et optiques

Eléments du support de rampe
Fig. 16: Ventirad et multichip.
Fig. 17: Support de rampe 3D, inclinés.
Fig. 18: Spot assemblé.
Fig. 19: Partie visible du carter de spot.

4. Automatisation de l’éclairage

4.1. Composants

L’automatisation s’appuie essentiellement sur des modules électroniques et une application pour l’interface opérateur/rampe :

  • Carte µprocesseur : Arduino Mega 2560 pour ses nombreuses entrées et sorties et les diverses fonctions de pilotage, communication, gestion du temps…
  • Module Wifi ESP-01 : pour les communications Wifi entre la rampe et un Smartphone
  • Module horloge DS3232RTC : de mémorisation du temps.
  • Thermocouple K : dans l’impossibilité de mesurer une température représentative au plus proche du multiships, le module thermocouple K a été remplacé par une gestion en fonction de la puissance lumineuse.
  • App. Virtuino : une application pour Smartphone permettant la création d’écrans, l’interface de communication opérateur/rampe, et les protocoles de communication avec le processeur.

4.2. Programme et paramétrages

La programmation du microprocesseur Arduino utilise le langage Arduino basé sur C++. L’ensemble des programmes est disponible dans le dossier AquaEclairage.zip. Le code permet d’adapter de nombreuses variables personnelles dont l’adresse et le mot de passe box Wifi.

Le programme permet les fonctions suivantes :

  • Photopériode : paramétrage de 4 temps déterminant deux variations de puissance (augmentation et baisse de lumière) et deux plateaux (maxi et mini). Les variations sont possibles lors d’un changement de journée.
  • Puissance (0-100%) et spectre (bleu-blanc) des spots : réglage de la puissance sur chaque canal (bleu/blanc), par paire de spot (5 paires de gauche à droite de la rampe).
  • Refroidissement : paramétrage de l’éclairage mini déterminant la mise en route des ventilateurs et maxi pour la marche forcée.
  • Modes : arrêt, manuel, pour des besoins spécifiques (observer, photographier), réglages (paramètres) et automatique (programme).
  • Modes de communication : deux écrans via l’app. Virtuino 6 sur Smartphone. Un écran de paramétrage permet la programmation et les modes de mise à jour du programme (reset ou usine). Un écran de visualisation affiche les paramètres sélectionnés et la situation de certaines fonctions.
  • Sauvegardes des paramètres actuels. Réinitialisation des paramètres opérateur (reset) ou par défaut (usine).
  • Mise à l’heure : par connexion quotidienne avec un serveur de temps.
  • Décalage fuseau horaire et heure d’été. : calculés selon la date et l’heure actuelle.
  • Relance automatique après rupture du courant, avec les paramètres sauvegardés.
Ecrans de communication
Fig. 20: Ecran des paramétrages.
Fig. 21: Ecran de visualisation.

 

5. Câblage électrique

5.1. Schéma de câblage

Le schéma suivant détaille les connexions des alimentations électriques et des modules électroniques.

Fig. 22: Schéma de câblage.

5.2. Réalisation du câblage

 

Assemblage de la galerie
Fig. 23: Câblage des spots.
Fig. 24: Câblage des éléments de commande.
Fig. 25: Mise en place de la galerie.

6. Utilisation

Apparence, réglages, manipulations… correspondent à mes attentes. Les optiques s’essuient facilement, deux à trois fois par an. En 3 ans de fonctionnement j’ai dû déplorer une panne d’alimentation vite remplacée, et un faux contact : une soudure imparfaite qui me conduit à donner le conseil de toujours tester les soudures, électriquement et mécaniquement. Mon seul regret serait de ne pas avoir envisagé plus la solution de dissipateurs passifs. Certes, la vitesse des ventilateurs s’ajuste selon la puissance d’éclairage et ils sont souvent inaudibles, mais au plus fort de l’éclairement j’ai du mal à les oublier dans le calme de la maison.

Le principe de réglage indépendant des spots permet d’ajuster la puissance selon les zones et les coraux. J’avais prévu 20 % de marge. Les relevés au quantum mètre m’ont conduit à abaisser les puissances à 80 % du maxi. Le logiciel de simulation s’avère donc un excellent outil. de conception.

Indépendamment d’un budget plus réduit (le coût de cet éclairage 600 W est 600 € plus 150 € pour la potence), un système DIY est plus facile à dépanner. Si besoin, il permet d’ajouter ou de faire évoluer les sources de lumière. Certes, cela nécessite un investissement en temps et l’acquisition de connaissances qui font défaut. Bricoler s’avère toutefois un bon moyen d’étendre ses compétences.

Fig. 26: Résultat final.

 

Cette réalisation inspirera-t-elle peut-être un bricoleur ? Bon bricolage !

Images liées:

Thèmes associés :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *