La réglementation sur la détention des espèces sauvages, ou plutôt « non domestiques » selon la terminologie officielle, a pour objectifs de respecter les équilibres écologiques et préserver la biodiversité ; garantir la sécurité et la santé afin d’éviter blessures ou transmissions de maladies ; assurer le bien-être des animaux et promouvoir la qualité des établissements et la technicité des éleveurs.
Vaste programme, que les aquariophiles amateurs se doivent de respecter ! Ces thèmes sont à la fois si variés et interdépendants qu’il est difficile d’en démêler les règles. Pourtant, la loi est insensible aux conjectures, tentons de la clarifier ici, factuellement. Cet inventaire législatif est un outil d’aide à la compréhension, il n’a bien évidemment aucune valeur règlementaire et son actualité reste suspendue à l’évolution des textes. A la date de publication de cet article, la loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale n’est pas votée. Compte tenu des nombreuses dispositions déjà prises sur les espèces sauvages elle n’impactera pas la pratique de l’aquariophilie de manière importante. Les ventes seront toutefois plus cadrées.
1. Textes règlementaires
Nous nous intéresserons ici, à la règlementation applicable sur le territoire français. Faut-il le rappeler ? Il est constitué de la métropole continentale et de ses 5 départements (DOM) : la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion et Mayotte. Métropole et DOM, les lois et règlements y sont les mêmes mais des adaptations peuvent exister, liées notamment à des droits anciens et une situation insulaire. Les autres terres ultramarines (Polynésie française, Saint Barthelemy, Saint Martin…) forment des territoires d’outre-mer, dont les statuts et l’organisation interne particuliers peuvent déborder du cadre de cet article.
La CITES, Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, dite aussi Convention de Washington, est un accord entre États, destiné à ce que le commerce des animaux et des plantes sauvages ne menace pas leur survie. Il s’agit en quelque sorte d’une charte à laquelle chaque État ou « Partie » adhère. Elle ne traite que du commerce international, c’est-à-dire l’importation, l’exportation, la réexportation et l’introduction en provenance de la mer hors frontières. Elle ne traite pas de la circulation et du commerce entre États ni au sein d’un même État. Elle ne dicte pas directement les obligations des professionnels et amateurs de l’aquariophilie.
La loi française en fait trop ! C’est une remarque récurrente des administrés, également fréquente dans le secteur animalier. Les imbrications des textes interconnectés de toutes part nuit souvent à leur compréhension. Cette complexité se traduit, aux yeux des citoyens, par la sensation que la France en rajoute toujours trop. Pourtant, une fois compris son sens global, la réglementation s’avère globalement beaucoup plus cohérente qu’elle ne parait de prime abord et j’ajouterais, concernant le sujet qui nous intéresse, d’une grande logique. Les mots sont choisis et les phrases structurées de telle sorte qu’il ne faut jamais leur en faire dire plus que ce qu’elles expriment. La complication vient parfois d’interprétations abusives, sorties de leur contexte, ou de restrictions ajoutées, dictées par des associations ou des fédérations nationales.
La loi française exige plus que l’Europe, elle va à l’encontre du but recherché ! C’est le rôle de tout pays d’intégrer des notions qui lui sont propres, mais les règles de chaque pays vont toutes dans le sens des engagements européens. La réelle difficulté de mise en œuvre, sur le terrain, renforce l’idée qu’il y a matière à simplifier. Cependant, notre jugement peut être altéré par une vision focalisée sur nos préoccupations propres. Nous ignorons d’autres impératifs pris en compte par la même règlementation, par exemple, pour intégrer d’autres espèces ou des risques sanitaires.
La Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe, pionnière dans ce domaine, protège la plupart du patrimoine naturel du continent européen. Plus proche de nos préoccupations, la Convention sur la protection du milieu marin et du littoral de la Méditerranée dite aussi Convention de Barcelone, intervient pour la protection contre les pollutions et la sauvegarde des ressources naturelles. Les pays signataires de ces conventions s’engagent à œuvrer de concert pour respecter les décisions, suivant des plans d’actions et de plusieurs manières dont la création d’aires spécialement protégées et l’identification des espèces en danger ou menacées.
Le règlement (CE) 338/97 du Conseil du 9 décembre 1996 relatif à la protection des espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce et ses annexes A, B, C et D, est le premier texte de référence intéressant les aquariophiles marins de l’Union européenne. Sa mission de protéger les espèces de faune et de flore sauvages par le contrôle de leur commerce intègre les exigences de la CITES et bien d’autres encore : la circulation entre États ou au sein d’un État, les espèces sauvages à l’intérieur de l’UE, la cession à des fins non lucratives, les conditions de transport, d’hébergement etc. Le règlement (CE) 865/2006 sera utile pour comprendre les modalités d’application du précédent règlement.
La France a arrêté récemment son principal texte d’application, à connaitre de tous : l’arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d’animaux d’espèces non domestiques. Il traite des animaux propres au pays et, au-delà des espèces à protéger, des espèces dangereuses pour l’homme et pour l’écologie. Il abroge l’essentiel de l’arrêté du 10 août 2004 qui ne fait plus loi.
Selon les situations, ces deux référentiels conduiront bien entendu vers d’autres textes : décrets d’application, arrêtés ministériels… compilés dans les Codes (civil, environnement, rural, douanes…), et ils sont nombreux.
La France a arrêté récemment son principal texte d’application, à connaitre de tous : l’arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d’animaux d’espèces non domestiques. Il traite des animaux propres au pays et, au-delà des espèces à protéger, des espèces dangereuses pour l’homme et pour l’écologie. Il abroge l’essentiel de l’arrêté du 10 août 2004 qui ne fait plus loi.
Selon les situations, ces deux référentiels conduiront bien entendu vers d’autres textes : décrets d’application, arrêtés ministériels… compilés dans les Codes (civil, environnement, rural, douanes…), et ils sont nombreux.
2. Espèces concernées
À propos des boutures de coraux
Des boutures successives conservent-t-elles le statut sauvage annexe B de leur pied mère ? Le règlement (CE) 338/97 répond sans ambiguïté : Un spécimen est considéré comme appartenant à une espèce inscrite aux annexes A à D s’il s’agit d’un animal, ou d’une partie obtenue à partir de ceux-ci, dont l’un au moins des « parents » appartient à l’une des espèces inscrites. Le statut d’inscription se transmet donc de parents à enfants. Ainsi, toute bouture d’un pied annexe B reste annexe B. Les affirmations basées sur le fait que l’aquariophilie récifale bénéficierait de dispositions relatives à l’aquaculture ne sont pas fondées.
La seule évolution pour la bouture concerne son code de source suivant le Guide d’application des codes de sources CITES. La première bouture élevée en aquarium, issue d’un parent code W (sauvage), passe au code F1 (né en captivité), puis F2 et F3 pour les boutures suivantes. Pour s’en prévaloir, encore faudrait-il résoudre, dans l’aquarium d’agrément, le problème du marquage des boutures pour les différencier du parent sauvage. Alors nous pourrions établir, comme en coralliculture, des certificats de cession indiquant Spécimens bouturés en France dans le cadre d’activité relevant de l’aquariophilie (Communication Cites/DDCSPP). Et nous pourrions envisager une règlementation assouplie pour des reproductions de coraux.
2.1. Animaux et végétaux concernés
Il est question ici d’espèces animales non domestiques, c’est à dire n’ayant pas subi de modification par sélection de la part de l’homme. Plus précisément, il suffit de consulter l’arrêté du 11 août 2006 fixant la liste des espèces domestiques pour constater que tous les animaux marins en sont exclus. Ils sont tous non domestiques.
Selon les situations, les poissons et invertébrés (crustacés, mollusques…) sont également classés animaux aquatiques, et ornementaux lorsqu’ils sont utilisés à des fins décoratives. Les poissons tropicaux d’aquarium sont alors des poissons tropicaux d’ornement. Ils deviennent animaux de compagnie lorsqu’ils voyagent avec leur responsable, comme nous allons le voir.
Nos devoirs légaux débutent dès lors que l’on détient un spécimen d’animal sauvage. Si la notion de spécimen est évidente pour un poisson, elle peut l’être moins pour un corail constitué d’une colonie de multiples polypes, et plus encore pour des fragments de ces colonies : autant de boutures qui vont se développer dans un milieu fermé. Au sens de la loi les coraux, qu’ils soient issus d’un massif corallien sauvage ou obtenus à partir de boutures de mariculture ou d’aquaculture (coralliculture) sont tous des spécimens et relèvent des exigences règlementaires liée à l’espèce avec toutefois quelques particularités administratives selon l’origine du spécimen, comme on le verra lors de la cession.
2.2. Sable et roches issus d’animaux règlementés
La règlementation concerne également les roches et le sable corallien (dits "vivants" ou inertes) au même titre que les espèces vivantes dont ils sont issus. La Conférence des parties CoP19 novembre 2022 définit les termes d’usage. En résumé :
- Sable de corail : le sable composé de fragments de coraux morts, finement écrasés, ne dépassant pas 2 mm de diamètre. Non identifiable au niveau du genre il n’est pas couvert par les dispositions de la Convention CITES.
- Fragments de coraux : les fragments non agglomérés de coraux morts, cassés ou digités, et autres matériaux de 2 à 30 mm mesurés dans n’importe quelle direction, qui ne sont pas facilement identifiables au niveau du genre ne sont pas couverts par les dispositions de la Convention.
- Roche de corail : le terme désigne la roche vivante et le substrat, matériau aggloméré dur, de plus de 3 cm de diamètre, formé de fragments de spécimens de coraux morts, en partie ou en grande partie non identifiables coraux morts, pouvant aussi contenir du sable cimenté, des corallines et d’autres roches sédimentaires.
- Roche vivante : il s’agit de grands morceaux de roche de corail (en général > 1 kg chacun) utilisés comme décoration et habitat dans les aquariums, sur lesquels sont fixés des spécimens vivants d’invertébrés et de corallines non inscrits aux annexes CITES. La roche vivante ne devrait pas être considérée comme un spécimen d’espèce de corail inscrite à la CITES. Elle est actuellement soumise aux dispositions de la Convention.
- Substrat : il s’agit des petits morceaux de roche de corail (en général < 0,5 kg chacun) servant de socle aux invertébrés (non inscrits aux annexes CITES) qui y sont fixés tels que les anémones ou les coraux mous. Le substrat, non identifiable au niveau du genre, ne doit pas être considéré comme un spécimen vivant ou mort d’une espèce de corail inscrite à la CITES. et ne devrait pas être soumis soumis aux dispositions de la Convention.
- Corail mort : les morceaux de coraux exportés morts mais qui peuvent avoir été prélevés vivants, dans lesquels la structure des corallites (squelette du polype individuel) est encore intacte sont identifiables au niveau de l’espèce ou du genre et soumis aux dispositions de la Convention.
Que l’expression est réductrice ! Bien loin de ce que représentent les poissons et invertébrés pour nombre d’aquariophiles marins. Quelle image négative transmise par les textes à ceux prompts à dénigrer ! Non, un poisson d’aquarium n’est pas assimilé à une boule de Noël que l’on sortirait pour épater la galerie et que l’on rangerait la fête terminée. Nombreux sont ceux qui s’efforcent, dans les pages de ZebrasO’mag, sur les forums tels que Cap récifal, dans les aquariums publics, au sein des associations et incontestablement au cœur des administrations œuvrant pour le respect du milieu naturel, pour que cette approche primaire ne soit plus. Dans le milieu captif d’un aquarium récifal, même s’il est beau, même s’il est étrange et parfois mystérieux, l’animal marin est avant tout un élément de la biocénose que chaque aquariophile récifal, naissain de biologiste, introduit dans un biotope réduit qu’il veut le plus équilibré possible. Bio ! Il y voit d’abord la vie.
Doué de sensibilité disaient-ils ! La législation pourrait s’en souvenir.
2.3. Protection et dangerosité
Aucun animal non domestique n’échappe à la règlementation, les obligations diffèrent selon l’espèce. Deux critères prévalent : son niveau de protection et sa dangerosité.
- Le niveau de protection règlement (CE) 338/97, varie selon le risque : de A pour les espèces en voie d’extinction à D pour celles simplement sous surveillance. Sont également concernées les espèces dont l’introduction constitue une menace écologique pour des espèces de faune et de flore sauvages indigènes de la Communauté. À cela s’ajoutent quelques dispositions communes à toutes les espèces, même non protégées.
- Les espèces dangereuses : il s’agit d’espèces dangereuses pour la vie de l’homme telles le coquillage Conus textile mortel ou la Rascasse volante Pterois volitans venimeuse. Dangereuses aussi pour l’environnement tel Crepidula fornicata le berlingot de mer, compétiteur trophique des huitres et des gastéropodes locaux, qui a débarqué sur les plages normandes avec les navires de nos libérateurs venant d’outre-manche
Les végétaux marins semblent un peu oubliés : l’arrêté du 14 février 2018 relatif à la prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain ne site aucune espèce de flore marine. De rares textes évoquent des espèces protégées ou invasives telles que les fragiles posidonies et l’algue Caulerpa taxifolia qui colonise encore quelques zones méditerranéennes.
2.4. Liste des espèces marines règlementées
La liste Statut règlementaire des espèces marines ci-jointe regroupe les espèces animales et végétales sujettes à des obligations particulières européennes et françaises.
Le règlement (CE) 338/97 détermine dans ses annexes, quatre niveaux de protection :
- Annexe A : Espèces menacées d’extinction, interdites d’importation pour le commerce.
- Annexe B : Espèces potentiellement menacées, sujettes à autorisations. Cette annexe inclut les coraux scléractiniaires mais aussi les coraux morts dont seuls les éléments de petite taille non identifiables (sable et fragments) ne sont pas protégés.
- Annexe C : Espèces localement menacées, inscrites à la demande d’un État membre.
- Annexe D : Espèces sous surveillance.
Il convient aussi de consulter les décisions du Groupe d’examen scientifique ou SRG (Scientific Review Group) de la Commission européenne à la rubrique Meeting Agendas and Summaries de sa page internet. Ce dernier est habilité à suspendre temporairement l’importation vers l’Europe d’une sélection d’espèces en provenance de certains pays. Ce dispositif permet de comprendre pourquoi certaines espèces ne sont pas disponibles sur le marché européen alors qu’elles le sont dans d’autres pays.
La France, de son côté a arrêté plusieurs décisions en relation avec l’aquariophilie marine :
- Arrêté du 19 juillet 1988 : espèces végétales marines protégées sur l’ensemble du territoire. On y trouve les deux plantes d’herbiers Cymodocea nodosa et Posidonia oceanica endémique de méditerranée, qu’il est interdit de collecter ou d’utiliser.
- Arrêté du 4 mars 1993 : relatif à l’algue invasive Caulerpa taxifolia.
- Arrêté du 21 novembre1997 : liste des espèces considérées comme dangereuses.
- Arrêté du 20 décembre 2004 : animaux de la faune marine protégés sur le territoire.
- Arrêté du 14 février 2018 : prévention de l’introduction et de la propagation des espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain (aucune espèce marine).
- Arrêté du 25 avril 2017 : coraux protégés en Guadeloupe, en Martinique et à Saint-Martin.
Même si elles ne sont pas toutes règlementées aujourd’hui, la liste intègre à titre informatif une partie des espèces protégées des annexe II et annexe III de la Convention de Barcelone, permettant aux lecteurs d’appréhender leurs situations réelles face aux menaces d’extinction, et de les préserver.
Nota : La figure 1 a pu évoluer depuis la date d’édition de l’article. Il convient de l’actualiser à partir des textes cités.
3. Règlementation relative aux espèces
Qu’elles soient imposées par l’Europe ou par la France, depuis l’acquisition, la circulation jusqu’à l’élevage et la cession, en milieu professionnel ou non lucratif, les détenteurs sont soumis à des règles strictes liées aux espèces.
3.1. Acquisition : importations, cessions et prélèvements naturels
À tout moment, qu’il s’agisse d’un acte de commerce : importation ; exportation ; transit ; cession, de circulation ou d’élevage, le détenteur doit pouvoir prouver selon le cas : l’origine ou l’acquisition licite de chaque animal non domestique. Cette preuve consiste à présenter aux autorités un document d’acquisition renseigné comme il se doit. Le document (permis d’importation, attestation de cession…) et les informations qu’il contient varient selon la position géographique et la destination du spécimen. Il s’agit du premier maillon de la chaîne de traçabilité propre à garantir la protection des espèces sauvages.
3.1.1. Importation vers le territoire de l’UE
L’importation par un aquariophile amateur est rare. Plus complexe qu’elle ne parait, elle ressort des compétences des professionnels de l’import regroupant parfois des infrastructures et une organisation pour l’acclimatation et la vente en gros. Après avoir créé un compte, le site Internet i-cites permet d’accéder aux demandes de permis ou de notifications imposés par le règlement (CE) 338/97 pour l’importation, le transit ou la (re)exportation. De nombreux didacticiels y détaillent les modes opératoires. On y trouvera les coordonnées du service local à contacter ainsi que des informations sur les dernières évolutions règlementaires.
- Annexe A et B : effectuer une demande de permis d’importation en ligne avec, en pièce jointe, le permis d’exportation CITES obtenu par l’expéditeur. Le permis d’importer, parfois suspendu à des quotas par espèces, ne sera pas toujours favorable. Dans l’éventualité d’un accord, le service instructeur retournera les trois volets du dossier à présenter au bureau de douane frontalier. Si l’expéditeur a pu produire un certificat d’exportation, les vérifications nécessaires effectuées, le feuillet jaune visé devient la preuve de l’origine licite de l’animal. Notons que le permis d’importation est individuel dans le cas d’espèces protégées annexe A. En revanche il peut être attribué par lots pour les espèces annexe B, non marquées, telles que les « coraux durs » Scléractiniaires. La traçabilité est alors globale, avec sa part d’incertitudes lorsque le lot est disséminé sur le territoire français.
- Annexe C et D : Le processus est similaire pour traiter dans ce cas plus simple, la notification d’importation exigée par les douanes.
- Hors annexe : une attestation de cession suffit. Elle n’exclue pas les formalités sanitaires comme on va le voir.
3.1.2. Cession entre deux États membres ou au sein d’un État
La cession consiste en un achat, une vente, un échange ou un don. La cession de tout animal non domestique réalisée entre des personnes physiques ou morales, demeurant dans deux États différents de l’UE ou au sein d’un même État, nécessite la délivrance d’un certificat de cession.
3.1.2.1 Le pays d’origine : il dépend du cas de figure
Les informations, et notamment la preuve d’acquisition / d’importation, diffèrent selon le pays d’origine (ou de provenance) au sens du règlement (CE) 338/97 . Ce pays d’origine dépendant, lui aussi, de l’origine du spécimen : naturelle ou d’élevage. Ainsi le pays d’origine est :
- Le pays dans lequel le spécimen a été capturé ou prélevé dans son milieu naturel. Il s’agit de pieds mères, de boutures, prélevés en mer ou issus de maricultures en dehors de la Communauté européenne.
- Le pays dans lequel il a été élevé en captivité ou reproduit artificiellement. A ce stade, l’aquariophile s’interroge sur sa position par rapport aux notions d’élevage et de reproduction artificielle.
- Notion d’élevage en captivité : prenons l’exemple fréquent d’un récifaliste particulier hébergeant en captivité, dans son installation personnelle (aquarium du salon, bacs annexes d’observation…), une quantité autorisée de spécimens de coraux scléractiniaire SPS annexe B. Au sens de l’annexe 2 de l’arrêté du 8 octobre 2018, il s’agit bien d’une installation d’élevage de régime de détention (a) (Cf. chapitre 4), anciennement dénommée "élevage d’agrément". La certitude de l’organisme de vérification (OFB) que l’élevage répond aux critères (cf. chapitre 4), s’appuie sur l’analyse de l’installation in situ, des certificats de cession ou tout autre élément qu’il juge utile.
- Notion de reproduction artificielle :
- Reproduction : dans l’exemple d’un pied mère de corail scléractiniaire, quelle que soit sont origine (naturelle ou élevage), toute croissance de la colonie est le fait d’une reproduction (en général asexuée). Ainsi, une bouture issue de la fragmentation du nouveau squelette calcifié ou la séparation de nouveaux bourgeons… est un spécimen issu de reproduction.
- Reproduction artificielle: en aquariophilie récifale, on ne pratique pas (encore) d’insémination artificelle, de transferts d’embryons, ni de fécondation in vitro. Par contre le corail, lequel rappelons le est une colonie, se reproduit par clonage de polypes (division, bourgeonnement, propagation…). Il en est de même dans le milieu clos, contrôlé et artificiel que représente le système d’aquarium récifal. Ainsi, la portion nouvellement développée, postérieurement à la date d’acquisition, séparée du pied mère par fragmentation (du bourgeon ou d’une branche) répond au critère. Une bouture de corail est issue de reproduction artificielle.
Pour résumer, l’aquariophile amateur est en général face à trois situations :
- Le spécimen est un pied mère issu du milieu naturel (récif) : l’aquariophile doit pouvoir prouver son importation licite (ex. n° CITES)
- Le spécimen est issu d’une fragmentation du squelette (bouture) d’un pied mère (quel qu’il soit). On ne considère alors que la portion reproduite en élevage issue d’une croissance (amateur ou professionnel). Selon sa provenance :
- Le spécimen reprroduit provient d’un pays hors CE (mariculture, aquaculture…) : l’aquariophile doit pouvoir prouver son acquisition licite (certificat de cession) et son importation licite (ex. n° CITES).
- Le spécimen reproduit provient d’un pays de la CE (aquaculture pro, élevage amateur) : l’aquariophile doit pouvoir prouver son acquisition licite (ex. certificat de cession sans besoin de n° CITES).
3.1.2.2 La cession
L’arrêté du 8 octobre 2018 définit les conditions de délivrance de ce certificat en France dans le respect du règlement CE (figure 3). Il est détaillé pour les espèces annexe A et simplifié pour les autres cas.
- Annexe A :
La vente de spécimens appartenant à l’annexe A est interdite sauf dérogations, par exemple concernant les individus nés en captivité. De même la circulation à l’intérieur de l’UE d’un spécimen annexé A, nécessite une autorisation. La demande des certificats dits intracommunautaires (CIC), conformes au règlement (UE) 792/2012, attribués pour un détenteur ; un animal ; détenu en un lieu, sont formulées via le site i-CITES. Le nouveau propriétaire devant déclarer à son tour l’animal acquis, suivant le même protocole.
L’attestation de cession détaillée du type Cerfa 14367*01 doit comporter a minima les informations suivantes. S’agissant de poissons ou d’invertébrés marins, certaines précisions telles que l’âge, le sexe ou le marquage, ne pourront être fournies :- Descriptif des spécimens : noms scientifique et vernaculaire ; sexe s’il est connu ; âge ou la date de naissance si connus ; caractères particuliers ; origine (naissance en captivité, importation, prélèvement dans la nature) ; statut juridique (annexe A, B, C) ; mode et numéro de marquage, le cas échéant.
- Identifications du cédant et du cessionnaire : nom ou raison sociale ; coordonnées complètes.
- Références des autorisations de détention du cédant et du cessionnaire pour le régime (a) d’établissement.
- Références des autorisations administratives requises, le cas échéant : le n° Cites pour les spécimens ayant été introduits dans l’UE.
- Conditions de l’attestation : date, lieu et conditions financières de la cession.
- Annexe B, C, D et hors annexe : Le règlement (CE) 338/97 autorise la vente des spécimens appartenant à l’annexe B seulement si le vendeur peut fournir la preuve que les spécimens ont été acquis conformément à la législation en vigueur et, s’ils ne proviennent pas de la CE, qu’ils y ont été introduits conformément à la législation.
L’attestation de cession, la preuve d’acquisition licite, peut utiliser le même formulaire ou prendre la forme simplifiée d’un ticket de caisse ou d’une facture qui doit comporter a minima :- Le nom ou la raison sociale et les coordonnées complètes du cédant.
- Le nom ou la raison sociale et les coordonnées complètes du cessionnaire.
- La date, le lieu et les conditions financières de la cession.
- Concernant les spécimens Annexe B
- D’origine hors CE : mentionner la référence au certificat d’importation Cites (numéro Cites) comme preuve d’introduction légale dans la CE. Exemple : une bouture importée dans la CE).
- D’origine intra CE : sans référence Exemple : une bouture d’aquaculture intra CE).
Dans tous les cas, le cessionnaire est responsable de la validité des informations fournies. L’acquéreur ne découvre l’origine du spécimen qu’à leur lecture. Ce dernier doit les reporter telles qu’elles s’il devenait à son tour cessionnaire d’une bouture du spécimen. Ces informations de traçabilité sont essentielles à l’administration, l’Office français de la biodiversité (OFB), pour vérifier l’origine des spécimens conformément au règlement (CE) 338/97. L’OFB pourra, en cas de doute, s’informer auprès du cessionnnaire et libérer l’acquerreur de toute suspicion.
Notons que le détenteur d’un spécimen annexe B peut le céder uniquement après s’être assuré que le destinataire est correctement informé des conditions d’hébergement, des équipements et des pratiques requis pour que le spécimen soit traité avec soin.
3.1.2.3. L’attestation de cession
L’attestation de cession est toujours établie en deux exemplaires signés par les deux parties dont chacune conserve un exemplaire. L’engagement sur l’honneur du modèle Cerfa 14367*01 étant inapproprié aux espèces marines, le cédant devra le biffer. Des associations proposent des formulaires d’attestations simplifiés, conformes à l’arrêté, parfois sous forme de carnets autocopiants faciles à renseigner.
L’attestation doit être intégralement renseignée, que la vente ait lieu en France ou depuis l’étranger, et qu’elle soit réalisée sur site (magasin, bourse, chez un particulier…) ou à distance (VPC…).
Les dispositions récentes, imposant l’adresse et la signature du cessionnaire, ne sont pas sans poser quelques difficultés d’applications. Pourtant, en toutes circonstances, chacun doit s’y soumettre.
J’attire l’attention sur l’importance de mentionner l’origine du spécimen (prélèvement en milieu naturel ou élevage/reproduction), ainsi que le pays d’origine du spécimen (hors CE ou intra CE). Ces informations conditionnant le détail des preuves requises (l’acquisition et le cas échéant l’introduction dans la CE).
Bouturer sans contrainte règlementaire… L’aquariophile dont les colonies coralliennes prolifèrent estime que la multiplication de ses boutures va dans le sens d’un moindre prélèvement dans le milieu naturel, et qu’à ce titre la règlementation devrait être assouplie, voire supprimée. Le raisonnement semble cohérent. Cependant, toujours dans l’impossibilité de marquer les boutures, on ne peut pas les distinguer d’un parent sauvage. Une dérèglementation ouvrirait la porte à toutes les fraudes, avec l’effet inverse d’amplifier rapidement ledit prélèvement.
Bouturer sans cesse dans des espace clos… Cela présente-t-il un risque ? La conservation des mêmes espèces confinées, sans interaction avec d’autres, se traduit à long terme par un appauvrissement de la biodiversité. Il en est de même pour les bactéries constituant le microbiote, hôte du mucus des coraux, garant de leur santé. Les souches bactériennes bénéfiques au corail se réduisent au profit de celles pathogènes qui prolifèrent, l’affaiblissent et se répandent inexorablement, de boutures en boutures, d’aquariums en aquariums… jusqu’à anéantir la résistance du corail. Une explication à la lente régression parfois constatée dans des aquariums récifaux, sans cause apparente.
3.1.3. Prélèvements dans le milieu naturel
Prélèvements à l’étranger
Aujourd’hui, tous les pays sont soucieux de protéger leur patrimoine. Le détenteur d’une espèce protégée prélevée en milieu naturel à l’étranger devra pouvoir prouver à tout moment son origine légale. Il devra présenter un certificat attestant que le spécimen a été prélevé conformément à la législation en vigueur sur son propre territoire. Il convient de se renseigner, au-delà des informations communiquées aux points d’entrée dans le pays (ports, aéroports…). Ainsi, les pierres coralliennes, vivantes ou mortes, compatibles avec l’aquariophilie récifale, ne peuvent pas être prélevées sur les plages d’Égypte ou d’Indonésie. Le certificat de prélèvement en possession, il faudra ensuite entamer les démarches administratives et sanitaires pour introduire le spécimen dans le territoire de l’UE.
Prélèvement de la flore et de la faune sauvage en France
Certaines zones côtières du territoire français : aires marines protégées et parcs nationaux marins de métropole et d’outre-mer, sont destinées à préserver la faune et la flore sauvage. Ces espaces sont nombreux et spécialisés dans la protection d’espèces ciblées. La pêche, la cueillette y sont règlementées de manières diverses et parfois totalement interdites toutes espèces confondues. Il convient de se renseigner auprès de l’Agence française pour la biodiversité, chargée de leur gestion, ou de la Direction des affaires maritimes locale, des limites géographiques et des pratiques permises.
Même si toutes les espèces citées aux annexes II et III de la Convention de Barcelone ne sont pas frappées d’interdictions via des arrêtés nationaux, elles méritent sans exception notre attention pour ne pas les prélèver.
L’arrêté du 20 décembre 2004 fixe la liste des animaux de la faune marine protégés sur l’ensemble du territoire français. La liste jointe mentionne Protégés en France les gastéropodes, bivalves, crustacés et échinodermes concernés. Quel qu’en soit le lieu et en tout temps, il est interdit de détruire ou de dégrader leur milieu particulier. Il est interdit également de détruire, capturer, perturber, transporter, colporter, mettre en vente, vendre ou acheter ces espèces, que les animaux soient vivants ou morts.
La liste récapitule également les végétaux frappés d’interdictions : l’arrêté du 19 juillet 1988 identifie deux plantes d’herbiers Cymodocea nodosa et Posidonia oceanica endémique de Méditerranée, qu’il est interdit de collecter ou d’utiliser ; l’arrêté du 4 mars 1993 interdit la collecte, l’utilisation… jusqu’au rejet en mer de l’algue invasive Caulerpa taxifolia.
Enfin, des arrêtés préfectoraux peuvent restreindre à quelques espèces l’autorisation de la pêche de loisir en mer, sous-marine ou à pied. La pêche de loisir est par définition une pêche non commerciale. Les espèces pêchées sont destinées à l’usage exclusif du pêcheur et de sa famille et ne peuvent être vendues. Il s’agit généralement de poissons, de crustacés, de bivalves et des oursins. Les tailles sont alors calibrées, la quantité limitée par personne, les accessoires autorisés par espèce : filet, casier, haveneau, couteau, croc, épuisette, griffe à dents, pelle, râteau… parfois à partir d’une date et durant une période délimitée. La règlementation concernant ce type de collecte varie notablement d’une région à l’autre, elle impose de se renseigner auprès des offices de tourisme ou des magasins locaux qui disposent de brochures à destination des usagers.
En dehors de ces restrictions, la collecte d’espèces vivantes sur les côtes du littoral est autorisée sans autre limitation que celle dictée par l’écoresponsabilité du citoyen de la planète Terre.
Prélèvement de roches, de sable ou d’eau de mer sur nos côtes
Toute extraction de matériaux, lorsqu’elle risque de compromettre l’intégrité des plages, falaises, zones d’herbiers, frayères est interdite par l’article L321-8 du Code de l’environnement relatif à la protection du littoral marin. Cela concerne le prélèvement de sable ou de roches (galets, pierres inertes ou non) qu’ils soient hors de l’eau ou dans l’eau. Oui, l’évaluation du risque de compromettre l’intégrité du littoral est imprécise, elle est donc laissée à l’appréciation de l’agent contrôleur. Oui, il peut toujours décider de verbaliser.
Les eaux côtières sont définies par les eaux de surface situées en-deçà d’un mille marin de la ligne des côtes. Pour citer l’article 714 du Code Civil : Il est des choses qui n’appartiennent à personne et dont l’usage est commun à tous. Des lois de police règlent la manière d’en jouir. L’eau côtière, comme toutes les eaux, est de celle-là. L’article R214-5 du Code de l’environnement précise que tout prélèvement inférieur ou égal à 1 000 m3 d’eau par an, qu’il soit effectué par une personne physique ou une personne morale et, qu’il le soit au moyen d’une seule installation ou de plusieurs, est assimilé à un usage domestique. Le législateur estime que l’impact de toutes formes d’usages d’un tel volume sur le milieu aquatique est trop faible pour justifier d’autres obligations. Un aquariophile peut donc prélever de l’eau de mer, en deçà de ce volume, avec ou sans pompage, pour la maintenance de ses protégés. Au-delà, l’installation est soumise aux régimes d’autorisation ou de déclaration d’établissement suivant l’article R214-1 du Code de l’environnement.
3.2. Formalités administratives et sanitaires d’introduction dans le territoire
Les animaux étant acquis, s’ils n’ont pas été prélevés sur le littoral, il s’agit maintenant de les introduire sur le territoire. L’acquéreur doit s’assurer préalablement que les conditions prévues de manipulation, de conditionnement et de transport respectent les règles pratiques énumérées en fin d’article.
Pour prévenir le risque d’introduction et de propagation d’organismes nuisibles, l’annexe 1 de l’arrêté du 21 janvier 2015 interdit toute importation de plante vivante dans le territoire de l’UE : boutures, plantes racines nues, plantes en pot ; feuillages, feuilles, rameaux ; semences, graines… Pas question d’introduire des graines de palétuviers en provenance de pays exotiques. Les importations, dans les bagages des voyageurs, de végétaux qui ne sont pas repris dans cette annexe sont autorisées sans contrôle phytosanitaire. C’est le cas des algues marines.
La circulation au sein de l’UE est libre. L’est-elle a fortiori au sein de la France ? Pas vraiment : des arrêtés préfectoraux restreignent encore la liste des espèces animales ou végétales admises dans certaines zones du territoire français. C’est le cas des départements d’outre-mer qui interdisent l’introduction de presque tous les végétaux. Cependant, cette restriction à sens unique n’interdit pas de ramener en métropole, dans ses bagages, la gousse de palétuvier en provenance d’un DOM. À condition toutefois que sa cession ou son prélèvement ne soient pas interdits par arrêté local.
La circulation des marchandises est complexe, il convient de se renseigner auparavant et au cas par cas auprès du service des douanes.
L’autorisation d’introduction de spécimens non domestiques dans le territoire de l’UE est subordonnée à la présentation des attestations d’acquisition et de documents sanitaires. Ils doivent donc être déclarés préalablement. L’absence de déclaration peut entraîner une amende voire la confiscation de l’animal. L’arrêté du 19 juillet 2002 précise les conditions sanitaires qui diffèrent selon qu’il s’agit d’animaux de compagnie ou pas.
3.2.1. Introduction des animaux de compagnie
Le règlement (UE) 576/2013 prévoit un cadre allégé uniquement pour les animaux de compagnie. Les animaux sont alors dits de compagnie lorsqu’ils accompagnent leur propriétaire ou un représentant. C’est-à-dire dans un délai jusqu’à cinq jours avant ou après son voyage. Sont autorisés, dans une limite de cinq spécimens, certains animaux aquatiques ornementaux (destinés à des fins exclusivement décoratives) dans le cadre d’un mouvement sans caractère commercial (aquariums d’agrément fermés, sans but lucratif).
Les espèces autorisées sont celles de l’annexe 1, Partie B de ce règlement :
- Les invertébrés (coraux, étoiles de mer, vers à panache…) à l’exception des mollusques (gastéropodes, bivalves…) et des crustacés (crevettes, crabes, balanes…), sous réserve d’autres limitations telles que les interdictions frappant certains coraux des Antilles ;
- Les poissons de la super-classe des Agnatha (poissons sans mâchoire : Lamproie marine) et de la classe des Chondrichthyes (poissons à squelette cartilagineux : raies et requins) et de la classe des Osteichthyes (poissons à squelette osseux qui représentent la plupart des poissons d’aquarium marins).
Un vétérinaire habilité doit délivrer un document d’accompagnement bilingue conforme à l’annexe 27 de l’arrêté du 19 juillet 2002 dont le contenu varie selon que l’animal circule dans l’UE (article 28) ou provient d’un pays tiers (article 30). Le contrôle à l‘entrée de l’UE ou entre deux États membres, en présence des animaux, est documentaire et réalisé par les services des douanes.
3.2.2. Introduction des animaux de compagnie
Les autres situations ne bénéficient pas du dispositif particulier réservé aux animaux de compagnie. Il peut s’agir d’animaux aquatiques ornementaux non commerciaux tels que des gastéropodes ou crustacés ; d’espèces non ornementales ; d’activités à statuts professionnels (aquacultures, commerce) ; de lots constitués de grandes quantités ; d’espèces sensibles à certaines maladies (moules, huitres, crevettes…) etc.
L’arrêté du 19 juillet 2002 précise alors les conditions sanitaires d’introduction. L’importateur fait établir, dans le pays d’origine un certificat zoosanitaire vétérinaire suivant l’annexe IV partie B du règlement (CE) n°1251/2008. L’intéressé notifie au poste d’inspection frontalier (PIF), un jour au moins avant l’arrivée, l’introduction de tout animal dans le territoire de l’Union européenne. Les services vétérinaires procèderont au contrôle sanitaire de ces animaux dès leur arrivée au poste. Ils délivreront le document vétérinaire commun d’entrée (DVCE) qui devra être obligatoirement présenté à l’appui de la déclaration en douane. Passé ce stade, les spécimens pourront rejoindre leur destination finale, accompagnés de leurs documents.
3.3. Circulation à l’intérieur du territoire français
Les animaux parvenus ou détenus en France, il s’agit de les mener à leur nouvelle destination. Avant transport, le détenteur a dû s’assurer que les conditions de manipulation, de conditionnement, de transport ainsi que les établissements de destination et l’utilisateur satisfont aux exigences législatives et réglementaires listées en fin d’article.
La circulation est libre en France, mais tout détenteur d’animal non domestique doit être en mesure de justifier son acquisition légale : le certificat d’importation s’il est l’importateur ; une attestation de cession dans les autres cas. Ce dernier cas vaut après une acquisition en magasin, un achat bourse ou le don d’un autre aquariophile. Les prélèvements dans la mer pourront être enregistré dans un registre d’entrée tenu comme il se doit. Sauf urgence vétérinaire, tout déplacement d’un spécimen relevant de l’annexe A du règlement (CE) 338/97, par rapport à l’emplacement formellement affecté, est subordonné à une autorisation préalable.
4. Règlementation relative aux établissements
Les textes abordés jusque-là insistent sur l’adaptation des installations d’hébergement et les compétences des éleveurs : Toute personne qui détient en captivité des animaux d’espèces non domestiques doit disposer d’un lieu d’hébergement, d’installations et d’équipements conçus pour garantir le bien-être des animaux hébergés et détenir les compétences requises et adaptées à l’espèce et au nombre d’animaux afin que ceux-ci soient maintenus en bon état de santé et d’entretien…
Pour s’assurer que ces objectifs seront atteints, le législateur impose des mesures aux établissements, à leurs protocoles ainsi qu’à la qualification des soigneurs. L’articulation des différents textes entre eux, est tentaculaire, le logigramme Règlementation relative aux espèces non domestiques aidera peut-être à sa compréhension.
4.1. Activités et catégories d’établissements
L’interprétation des textes impose de comprendre les termes employés. Les activités évoquées relatives aux espèces non domestiques sont bien distinctes, chacune avec ses spécificités. Citons les plus évoquées :
- La présentation au public : en structures fixes ou mobiles. Il s’agit des parcs zoologiques, des cirques… régis par l’arrêté du 25 mars 2004. Les expositions animalières, les journées portes ouvertes organisées par une association… ne relèvent pas de ce cas lorsque l’établissement organisateur héberge les individus sur site fixe plus de 90 jours consécutifs dans l’année et que le nombre total des présentations au public n’excède pas 7 jours par an ;
- Les soins : ce sont les refuges, les centres d’hébergement… qui recueillent, soignent et entretiennent les animaux momentanément incapables de pourvoir à leur survie dans le milieu naturel.
- La vente : réalisée par des grossistes ou des magasins professionnels. Les ventes occasionnelles pratiquées par des amateurs n’entrent pas dans cette activité à condition qu’elles restent en deçà de limites financières et commerciales.
- La location : locations d’animaux avec leur dresseur pour le cinéma, la télévision, le spectacle, la communication ou l’évènementiel.
• Le transit : activité d’un transporteur, commissionnaire, producteur etc. habilité à réaliser les formalités de dédouanement au plus près de l’entreprise destinataire de façon à ne pas engorger les frontières communautaires. - L’élevage : il s’agit de la maintenance, depuis l’éclosion jusqu’à la mise en vente. C’est, l’activité d’un aquariophile qui dispose d’un bac à bouture ou d’une installation de reproduction. La multiplication de boutures de coraux ou l’élevage de Poissons-clown par un particulier ne relève pas des dispositions juridiques relatives à l’aquaculture. En effet, cette dernière se caractérise par la production en masse, dans des fermes spécialisées, au-delà de ce que peut fournir l’environnement naturel, sans relation avec la production d’un amateur.
- La détention : elle comprend la détention simple d’animaux dans une maison d’habitation ou leur exposition dans la salle d’attente d’un médecin, dans une galerie commerciale, dans un restaurant, etc.). Ce dernier cas n’est en effet pas assimilable à une activité de présentation au public. Le détenteur appliquera les démarches correspondant au régime de détention (a), (b) ou (c) selon les espèces et leur nombre.
Les établissements sont les lieux ou s’exercent les activités. La parution de l’arrêté du 8 octobre 2018 a vu la disparition de « l’établissement d’élevage d’agrément » cher aux particuliers. Il subsiste les deux types d’établissements de catégories 1 et 2, définis par l’arrêté du 21 novembre 1997, qui diffèrent selon l’activité exercée et la dangerosité des espèces maintenues :
- Les établissements de catégorie 1 regroupent ceux qui hébergent des espèces présentant des dangers ou inconvénients graves pour les espèces sauvages et les milieux naturels ainsi que pour la sécurité des personnes ; ceux qui pratiquent des activités de présentation au public ; enfin ceux qui execent des activités professionnelles d’élevage, de location, de vente ou de transit détenant des espèces protégées.
- Les établissements de catégorie 2 regroupent ceux qui, ne présentant pas de tels dangers ou inconvénients : établissements d’élevage professionnels, de location, de vente ou de transit ne détenant pas d’animaux d’espèces protégées ou dangereuses ; les établissements d’élevage à caractère non professionnel lorsqu’ils ne détiennent pas des animaux d’espèces dangereuses ; les établissements de soins. Ils doivent néanmoins assurer la protection des espèces sauvages et des milieux naturels ainsi que la sécurité des personnes.
- Autres cas : comme le montre le logigramme, la suppression de l’établissement d’élevage d’agrément simplifie la situation. De même la suppression de l’installation d’élevage à caractère non professionnel de catégorie 1 qui cadrait la détention d’espèce dangereuse par un particulier. Ce dernier relève dorénavant et tout logiquement de l’établissement de catégorie 1.
La notion de catégorie d’établissement ne détermine pas les formalités à remplir pour son ouverture. Ces dernières dépendent seulement du régime de l’établissement, comme nous allons le voir. Cependant elle conditionne le niveau d’expertise et de décision pour autoriser l’ouverture, et celui des installations et de l’organisation nécessaires à la pratique de l’activité.
4.2. Régimes de détention a, b, c
L’arrêté du 8 octobre 2018 a instauré dans son annexe 2 la notion de régime de détention. On n’y évoque plus les établissements, et le principe de catégorie d’établissement devient transparent à ce stade. En effet, le seul fait de détenir un certain nombre de spécimens d’une espèce classe le lieu dans un régime de détention (a), (b) ou (c), avec des formalités associées et ce, que l’activité soit professionnelle ou d’agrément. Ce classement clair permet au législateur de moduler, dans un simple tableau, les exigences règlementaires en fonction de plusieurs critères liés à l’espèce (dangerosité, niveau de protection), à l’activité (élevage, présentation au public, soins, scientifique…) et à l’étendue de l’installation (nombre de spécimens).
Formalités liées aux régimes de détention :
- Régime (a) ou régime de détention libre : il n’y a pas d’obligation relative à l’installation. C’est le régime de la majorité des aquariums amateurs.
- Régime (b) ou régime de déclaration : il nécessité de déclarer la détention des spécimens concernés. Il n’existe pas à ce jour d’espèce animale marine relevant de ce régime.
- Régime (c) ou régime d’établissement : nécessité de réaliser une demande d’ouverture d’établissement dans lequel un responsable doit être titulaire du certificat de capacité pour les espèces détenues.
La lecture de l’annexe 2 de l’arrêté s’avère parfois ambiguë : par exemple un « corail dur » invertébré scléractiniaire n’apparait dans aucun régime (a), (b) ou (c). Ce point devrait être levé dans une future évolution. Selon l’administration, il faut considérer que toute espèce n’apparaissant pas dans les colonnes (a), (b) ou (c) doit être considérée non concernée ou, ce qui revient au même : en régime (a) sans limite du nombre de spécimens.
Le logigramme sur la règlementation montre en trait épais gris le circuit de la grande majorité des aquariophiles marins détenant des poissons sans danger et des coraux tropicaux jusqu’au régime de détention (a) sans formalité d’établissement. Les tirets rouges représentent le circuit de cet aquariophile détenant un spécimen dangereux, par exemple un cône textile (famille Conidae), vers le régime de détention (c). Ce dernier doit obtenir une autorisation d’ouverture et un certificat de capacité pour les invertébrés concernés. Le circuit en tirets verts est celui du même aquariophile qui dépasserait les seuils acceptés pour une activité non lucrative, vers le régime (c).
4.3. Autorisation d’ouverture d’établissement
Les établissements, professionnels ou sans but lucratif, relevant du régime (c), doivent préalablement demander une autorisation de leur ouverture. La demande peut prendre pour exemple les notices proposées sur les sites Internet départementaux. Elle est adressée au préfet du département de l’établissement dès lors qu’un soigneur chargé des animaux dans l’établissement détient son certificat de capacité. Le dossier, en plus des données de base sur le propriétaire, sur l’établissement et sur la nature des activités, développe dans le détail plusieurs notions : la liste des équipements fixes ou mobiles (aquariums, cuves d’acclimatation ou de croissance, systèmes de traitements…) ; le plan des installations ; la liste des espèces et le nombre d’animaux prévus selon un plan de leur répartition ; une notice sur les conditions de fonctionnement et le certificat de capacité ci-dessus, sauf s’il existe une demande conjointe.
Le préfet examine la conformité du dossier et, pour un établissement de première catégorie, recueille l’avis des collectivités territoriales intéressées après, le cas échéant, une enquête publique. L’avis est prononcé dans un délai de 2 à 5 mois selon que l’établissement est de 2ème ou de 1ère catégorie. L’arrêté d’autorisation d’ouverture fixe la liste des espèces, le nombre d’animaux autorisé ainsi que les activités susceptibles d’être pratiquées en fonction notamment des impératifs de protection des espèces, des installations et des activités prévues. Il fixe également les prescriptions relatives à la sécurité et la santé publiques, à l’identification, au contrôle sanitaire, à la protection des animaux, à la prévention des fuites d’animaux et à l’introduction d’organismes nuisibles extérieurs. D’autres prescriptions particulières peuvent s’ajouter, par exemple dans le cas de présentation au public.
4.4. Certificat de capacité (CDC)
Toute installation relevant du régime de détention (c), en présence d’espèces protégées, dangereuses ou nécessitant des conditions d’entretien adaptées, doit employer une personne détenant un certificat de capacité animaux non domestiques (CCAND). Ce certificat atteste de sa connaissance des besoins biologiques, physiologiques et comportementaux d’un groupe d’animaux (poissons tropicaux, invertébrés…) et de son aptitude à pratiquer une activité précise (vente, élevage…) en relation avec celui-ci. Il est personnel.
Pour l’obtenir, le requérant présente une demande à la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations (DDCSPP ou DDPP) relative à son domicile. Le courrier précise la situation personnelle du demandeur, le type de qualification générale ou spéciale sollicitée (vente, élevage d’animaux non domestiques …) et ses motivations. Est joint au moins l’un des documents justifiant ses connaissances ou son expérience professionnelle : un diplôme ou une certification d’activité animalière délivrés par un organisme agréé ; un justificatif d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans avec les animaux ou une attestation de connaissance octroyée par la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF) après une formation.
Le candidat soumet un mémoire très étayé qui précise la liste exhaustive des espèces à détenir, développe les soins dispensés aux animaux puis détaille précisément l’aménagement des installations et le fonctionnement de l’établissement. Ce mémoire, édité en plusieurs exemplaires est transmis à différents services. Une commission de professionnels statue ensuite sur sa recevabilité. Dans l’affirmative, quelques mois plus tard, le candidat devra soutenir son mémoire devant un jury d’experts.
Pour les activités de vente ou d’élevage, le certificat de capacité est délivré par le préfet, éventuellement après avis d’une commission départementale experte dans la formation de faune sauvage captive. Il mentionne les espèces ou groupes d’espèces, le nombre d’animaux et le type d’activités pour lesquels il est accordé. Il peut être attribué pour une durée indéterminée ou limitée ou même suspendu ou retiré selon les circonstances. Le bénéficiaire peut demander sa modification, instruite dans les mêmes conditions.
4.5. Déclaration de détention d’animaux
Toute personne, physique ou morale, dont l’installation relève du régime de détention (b), élevage non lucratif d’animaux figurant en annexe 2 de l’arrêté du 8 octobre 2018 et dans la limite des effectifs fixés, doit déclarer (et non plus demander l’autorisation) la détention des animaux d’espèces non domestiques hébergés. Le demande s’effectue auprès de la DD(CS)PP du département de détention au moyen du formulaire Cerfa 15967*01 ou par télédéclaration sur le site Internet Démarches simplifiées. Indépendamment des coordonnées du demandeur et de l’installation seront précisées pour les espèces déclarées : les conditions d’alimentation et d’hébergement ainsi que les mesures d’hygiène et de prévention des maladies.
5. Règlementation relative à la traçabilité des animaux
La maitrise de la protection des espèces non domestiques et des risques liés aux espèces dangereuses impose une chaine de traçabilité la plus fiable possible. Les certificats d’importation ou de cession lors de l’acquisition en sont les premiers maillons. Nous abordons ici les suivants.
5.1. Marquage et enregistrement national
La faune sauvage de mammifères, oiseaux, reptiles et amphibiens protégés à des degrés divers et détenue en captivité est marquée de manière individuelle et permanente. Les procédés adoptés (transpondeur à radiofréquence sous cutané, tatouage de l’oreille, bague, photographie…) ne sont pas adaptables aux animaux aquatiques d’ornement : une micropuce déformerait un petit Nemateleotris, le tatouage d’une colonie corallienne serait éphémère, quant à baguer un nudibranche… Les technologies évolueront mais, pour l‘heure, la faune aquariophile n’a pas lieu d’être marquée. Elle n’a pas non plus à être enregistrée dans le fichier national d’identification : déclaration de marquage Cerfa 15969*01 ; ou site Internet I-fap (Identification de la faune sauvage protégée), comme c’est le cas pour les espèces concernées avant toute première session, par les vétérinaires, les éleveurs ou les propriétaires.
5.2. Registre d’entrées et sorties
L’arrêté du 8 octobre 2018 impose à tout détenteur d’animaux d’espèces non domestiques, quel que soit le lieu de détention, de tenir un registre des entrées et sorties de ces animaux… à l’exception de ceux qui relèvent du régime de détention (a).
Concrètement :
- Le registre doit être tenu en présence d’espèces dangereuses telles que le poisson Pterois volitans, les gastéropodes cônes ou la Pieuvre à anneaux bleus, et celles protégées ou en voie d’extinction telles que les coraux des Antilles ou l’oursin diadème.
- Le registre n’est pas exigé pour :
- Les espèces du régime (a) : par exemple celles qui entrent dans les catégories autres Scorpaeniformes tels que les rougets, autres Perciformes tels que les Poissons-clown ou autres mollusques tels que les bénitiers.
- Les espèces n’appartenant à aucun régime (a), (b) ou (c) : Le registre n’est pas exigé a fortiori pour ces espèces non citées telles que les coraux « durs » Scléractiniaires.
Cette règle vaut dorénavant également pour les spécimens détenus dans les établissements professionnels. Non exigé ne signifie pas qu’un aquariophile marin doit s’interdire de tenir un tel registre, ne serait-ce que pour suivre l’ancienneté de ses protégés en relation avec ses propres méthodes de maintenance, dans un conflit avec un tiers (vol, perte …), en cas d’évolution de la réglementation ou pour assurer l’administration de son intégrité lors d’un contrôle. Quoi qu’il en soit, même en l’absence de registre, le détenteur devra toujours pouvoir fournir la preuve de son acquisition licite et présenter les certificats de cession.
Le registre, aux coordonnées de l’éleveur et de l’établissement, peut être sous un format numérique incontestable ou constitué d’un cahier relié ou encore un classeur, dont les pages sont numérotées, paraphé en mairie ou dans un commissariat. Le nouveau formulaire Cerfa 15970*01 peut servir dans le cadre d’un élevage d’agrément. Les librairies et animaleries proposent également des registres adaptés aux animaux non domestiques, reliés et foliotés. Les informations y figurent à l’encre, sans blanc, ni rature, ni surcharge.
Pour chaque animal sont enregistrés :
- Date d’entrée ;
- Espèce : nom scientifique, à chaque ligne du registre doit correspondre un seul spécimen ;
- Numéro d’identification (le cas échéant) ; numéro de transpondeur, bague…
- Nature de l’entrée : don, achat, échange, naissance, etc… ;
- Origine : naissance en captivité, capture dans le milieu naturel, naissance, inconnue ;
- Provenance : nom ou raison sociale, coordonnées du magasin ou aquariophile cédant ;
- Justificatifs : références des autorisations administratives, le cas échéant : autorisation de transport, permis CITES d’importation, certificat intracommunautaire ; de tout autre document accompagnant l’entrée de l’animal : attestation de cession (achat, don, échange…) ; si naissance dans l’élevage et si possible : identification des parents.
- Date de sortie ;
- Nature de la sortie : vente, don, décès, etc…
- Destination de sortie : coordonnées du cessionnaire ;
- Justificatifs de sortie : attestation de cession (vente, don, échange…) ; le cas échéant : (autorisation de transport, permis CITES d’exportation, certificat CITES de réexportation, certificat intracommunautaire) ; certificat sanitaire et. Toutes copies sont annexées au registre.
- Cause de la mort : maladie, accident, vieillesse… si la mort correspond à la sortie.
Le registre est renseigné le jour même de chaque évènement relatif à un spécimen. Toutes les pièces justifiant la régularité des mouvements enregistrés lui sont annexées. Il est communiqué régulièrement ou présenté à leur demande, aux agents et services habilités de la DDPP et en charge de l’environnement. Le registre avec les pièces justificatives sont conservés au moins cinq années après sa clôture. Le registre tenu dans les règles est l’un des éléments pouvant justifier l’acquisition licite des animaux aux yeux des agents de contrôle.
5.3. Document d’information
Ce document n’est pas un élément de traçabilité mais il contribue à améliorer la pratique de l’aquariophilie. En effet, un animal aquatique d’agrément n’est pas seulement dans un aquarium pour agrémenter la vie de son éleveur. Il est source d’enrichissement des connaissances personnelles et, au-delà, sert à la pédagogie des observateurs, petits et grands. La mise en place des moyens et méthodes pour assurer son bien être passe par la collecte de toutes les informations le concernant. Ces dernières serviront alors tout naturellement à alimenter le document d’information sur l’espèce, que l’éleveur doit maintenant systématiquement délivrer à chaque acquéreur, avec le certificat de cession.
Le document d’information, en langue française, peut être commun à plusieurs espèces, par exemple par genre, ayant les mêmes besoins et conditions d’entretien. Il peut être électronique, c’est-à-dire que le cédant peut le fournir sur un support mémoire, par messagerie ou communiquer un lien pointant vers le document (sur son blog ou un site Internet tiers). Il doit contenir les éléments suivants (les exemples sont donnés à titre indicatif) :
- Les noms scientifique et vernaculaire de l’espèce. Exemple : Acanthurus leucosternon – Chirurgien poudré ou à poitrine blanche ; Acropora microclados Strawbery shortcake… tarte sablée à la fraise ! Soyons sérieux, on peut humblement en rester au genre Acropora sp.
- Son statut de protection : protégé, en voie d’extinction… le cas échéent, faire référence au règlement (CE) 338/97 (annexe B, C, D) ou la Cites (annexe II, III) ou la Convention de Barcelone (annexe 2 ou 3) ou classement UICN.
- Sa longévité : une information rare voire inexistante pour les poissons et invertébrés. Les durées de vies constatées en captivité varient dans des proportions telles qu’elles restent également approximatives.
- Sa taille adulte : on peut s’inspirer des informations du site Internet Fishbase sachant que la taille maximale en captivité dans un espace clos est toujours bien moindre que dans le milieu naturel.
- Son mode de vie sociale : relations interspécifiques, intraspécifiques ; vie en solitaire, en paire, en couple ou en bancs ; symbioses…
- Son comportement : poisson craintif, dominateur, territorial, agressif, dangereux ; corail agressif par contact, à distance (filaments mésentériques, allélochimie) … Animal fouisseur, de pleine eau, apprécie les promontoires ou les caches… ;
- Son mode de reproduction :
- Poisson : ovipare, incubateur buccal ;
- Coraux : reproduction asexuée par auto-étranglement, fragmentation, segmentation, séparation, stolonisation, bourgeonnement, scission, lacération… reproduction sexuée par fécondation interne ou externe…
- Son régime alimentaire et la ration quotidienne : prédateur, suspensivore microphage, brouteur, psammivore, limivore, carnivore, végétivore, détritivore, omnivore, zoo, phyto ou bactério planctonophage … le régime peut être constitué de nourriture vivante (artémies, micro et meiofaune) ou inerte (granulés, paillettes, congelée), éventuellement enrichie en vitamines et oligoéléments.
- Les conditions d’hébergement : qualité de l’eau (température, pH, salinité, alcalinité, PO4, Ca, Mg…) ; mode d’acclimatation ; conditions d’éclairement (direct, atténué, à l’ombre) quantité de lumière, spectre, photopériode ; brassage laminaire, turbulent, aléatoire, inversé ; décor avec anfractuosités, zones libres, sable, graviers, avec ou sans végétaux…
- Toute information complémentaire jugée utile pour garantir la satisfaction des besoins physiologiques et comportementaux : traitements mécaniques, biologiques ou chimiques de l’eau d’apport et de l’aquarium ; paramètres à respecter…
En vue d’une cession, ce document d’information comporte également la mention suivante : Afin de préserver la vie sauvage, l’animal dont vous venez de faire l’acquisition ne doit pas être relâché dans le milieu naturel.
6. Obligations fiscales
Tout revenu est imposable et doit être déclaré. La nouvelle imposition des français à la source ne dispense pas de compléter la déclaration annuelle de revenu. L’administration fiscale jugera si l’activité présente un caractère professionnel ou non, et les critères de calcul établiront dans quelle mesure ces revenus seront imposés.
6.1. Activités de commerce
L’aquariophile marin a très souvent une activité commerciale : qu’il cède quelques boutures de corail ; qu’il vende le fruit de ses reproductions d’hippocampes ; ou qu’il échange son écumeur devenu insuffisant. En effet, aux fins des règlementation, la location, le troc ou l’échange sont assimilés à de la vente, et toute expression analogue est interprétée dans le même sens. Mais cela ne s’arrête pas là : la mise en vente comprend également toute action pouvant raisonnablement être interprétée comme telle, y compris la publicité directe ou indirecte en vue de la vente et l’invitation à faire des offres (liste de boutures disponibles dans un blog ; annonces sur forum ou Leboncoin ; groupe spécialisé Facebook…).
Des critères quantifiés permettent de déterminer si une activité est commerciale ou non. Les agents chargés du contrôle : la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) qui a vocation à traiter les questions de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (ex DGCCRF), l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCF) et, le cas échéant, la Direction générale des finances publiques (DGFiP) statuent au cas par cas, après une enquête approfondie.
Parmi les critères pris en compte :
- L’infraction : la vente à la sauvette, en dehors de toute démarche légale ; un nombre de spécimens détenus supérieur à ce qu’autorise le régime de l’activité ; le dépôt vente en magasin ; la vente à un professionnel qui fait de l’éleveur amateur un professionnel.
- Le caractère lucratif des activités : le revenu issu d’une vente ponctuelle (cuve d’aquarium en fin d’activité ou en prévision d’un déménagement) n’est pas imposé à concurrence d’une plus-value (vente moins achat) de 5000 €. Au-delà, le vendeur est soumis au régime d’imposition des plus-values de cession de biens meubles au taux de 19 %. Les revenus de productions (fabrication de matériel, reproduction d’Amphiprion, élagage de coraux…) menant à quelques ventes annuelles (Leboncoin, eBay…) sont à mentionner dans le formulaire complémentaire 2042C Pro à la rubrique Autres revenus industriels et commerciaux non professionnels / Régime micro BIC / ventes de marchandises et assimilées / case 5NO. Les recettes étant imposées sur 29 % après l’application d’un abattement jusqu’à 71 %, une activité légale et raisonnable impactera peu le montant de l’impôt. La non-déclaration ou des barèmes d’impôts dépassés sont de nature à présumer un caractère lucratif.
- La régularité des actes de commerce : la vente à l’occasion de bourses animalières, lorsqu’elle se répète à plusieurs manifestations dans l’année, révèle une démarche commerçante. La limite acceptable n’est pas définie. Dans un autre domaine, on peut retenir que le Code du commerce limite aux particuliers leur participation à deux ventes au déballage.
- L’intention d’exercer une activité commerciale : cette notion importante aux yeux des agents de contrôle, permet de confirmer ou d’infirmer par quelques constats, les soupçons qui pourraient peser sur l’éleveur : la volonté de spéculer, c’est-à-dire de réaliser une simple plus-value comme, par exemple, la revente sans valeur ajoutée de fragments de coraux issus de pieds mère achetés pour l’occasion ; la publicité faite pour vendre ses boutures ; le fait d’attirer des acheteurs ; la petite taille des nombreuses boutures en regard de la dimension massive du pied de corail dans le bac principal ; la participation active à des ventes par petites annonces ou la création et l’animation d’un site organisé pour des ventes personnelles.
Parfois, l’éleveur devra pouvoir expliquer sa démarche et convaincre de sa bonne volonté. La bonne traçabilité au moyen du registre d’entrées et sorties pourrait y contribuer.
Le développement de nouveaux modes de communication a vu naître plusieurs formes de commerce par l’Internet. La loi Hamon autorise le e-commerce entre professionnels et acquéreurs, mais qu’en est-il des transactions entre particuliers réalisées par annonces ?
Depuis le 1er juillet 2016 le législateur impose aux plateformes de transactions à distance entre particuliers de biens ou de services telles que Leboncoin, intégrant un paiement, d’informer les utilisateurs sur leurs obligations sociales, fiscales, et sur le montant de leurs transactions. Ce dispositif améliore la transparence de ce commerce à distance. D’autres sites communautaires tels que Facebook limitent leur service à la mise en relation des internautes, potentiels acheteurs et vendeurs, sans intervenir sur les transactions financières. Bien que ce dernier interdise la promotion du commerce d’animaux vivants, on y trouve des groupes bien souvent fermés aux pratiques parfois opaques.
Pour vendre un animal, ces principes de commerce via un espace internet restent encore légaux en France. Ils ne le sont plus dans d’autres pays : la Belgique a interdit la publicité et la vente par internet en dehors de tout site spécialisé, déclaré comme tel. En effet, bien que le Code civil ait passé depuis 2015 son statut de « meuble » à « être vivant doué de sensibilité » l’animal reste soumis au régime des biens, autorisé pour un commerce en ligne. Pour ne pas être hors la loi, la vente doit cependant respecter toutes les obligations relatives à l’espèce et au régime de détention du vendeur non professionnel par, le cas échéant : l’identification, le marquage, l’enregistrement d’entrées et sorties, l’information sur l’espèce, la garantie sur l’aptitude de l’acheteur à maintenir l’espèce, le certificat de cession… L’organisation et la participation à de telles ventes n’a rien de virtuel. Leur répétition, le montant des revenus, de même que la publicité qui y est faite constitue autant d’actes de commerce et, de fait, peut conférer à un particulier organisateur ou participant, un statut de professionnel avec ses contraintes administratives et fiscales. Les revenus de cette économie « participative » sont imposables et doivent être déclarés au fisc.
7. Expositions publiques, rassemblement d’animaux
Tout particulier, association ou société peut organiser une exposition, une bourse d’échange aquariophile, un salon animalier… Il faut réaliser des démarches auprès de la mairie pour des questions d’ordre et de sécurité dans les lieux publics et auprès de la DDPP pour des questions sanitaires et de protection animale.
7.1. Autorisation municipale
Toute manifestation publique doit faire l’objet d’une déclaration de manifestation auprès du maire de la commune concernée au moins un mois avant ouverture et parfois un an dans certaines municipalités.
Les aspects abordés dans le dossier sont nombreux, spécifiques au type de manifestation et aux locaux : occupation du domaine public ; date ; durée ; structures prévues (chapiteaux, tribunes…) ; plan de masse ; carte du site avec emplacements des moyens de secours, des voies de circulation du public et accès des véhicules de secours ; effectif instantané et cumulé ; conformité des circuits et des tableaux de répartition électriques ; présence d’un agent chargé de sécurité ; sonorisation ; moyens de communication et d’alerte ; conformité relative aux établissements recevant du public (ERP) ; accès aux personnes handicapées , assurance, restauration et hygiène alimentaire ; licence de débit de boisson ; diffusion de musiques ; sanitaires…
Le maire en sa qualité d’autorité de police, s’assure que le dispositif de sécurité et les moyens de secours préventifs sont adaptés aux circonstances propres à la manifestation et aux risques prévisibles de troubles à l’ordre public. Il autorise l’ouverture après avis, le cas échéant, d’une commission de sécurité, selon la pertinence du dispositif prévu. Les mesures de sécurité sont, en toutes circonstances, de la responsabilité des organisateurs.
7.2. Déclaration à la DDPP
Un organisme exposant au public n’a pas à se déclarer en tant qu’établissement de présentation au public si ses animaux restent en locaux fixes plus de 90 jours consécutif et si ses manifestations n’excèdent pas 7 jours au total par an.
Cependant, les expositions et rassemblements d’animaux sont soumis à une réglementation définie par le Code rural et de la pêche maritime et ses décrets et arrêtés d’application. Elle aborde des aspects de santé liée au risque sanitaire élevé dû à la proximité d’autres animaux de provenances différentes, et de protection animale liée au stress d’individus déplacés et installés dans un lieu différent en présence d’autres animaux et du public.
Les dispositions générales peuvent varier sensiblement selon le département. Il est conseillé de se rapprocher du service départemental pour évoquer les spécificités de la manifestation et des animaux à présenter. L’organisateur doit au minimum :
- Déclarer le rassemblement à la DDCSPP du département un mois avant la date prévue au moyen du formulaire disponible sur son site ou par télédéclaration sur le site demarches-simplifiees.fr.
- Fournir en même temps la liste des exposants, le nombre et les noms d’espèces des animaux présentés ;
- Fournir également le nom du vétérinaire chargé des contrôles sanitaires et du compte-rendu d’intervention à la DDPP.
- Imposer et faire appliquer la règlementation relative à la protection des animaux et des personnes.
- Enregistrer les noms des exposants ayant participé et les espèces exposées.
Cela passe par l’établissement d’un règlement de l’organisation identifiant les responsabilités des exposants éleveurs et accepté par eux. Ces derniers garantissent les points suivants :
- Les animaux sont correctement identifiés conformément à la réglementation en vigueur ;
- Les animaux ne proviennent pas de zones contagieuses ;
- Les individus sont sains, sans lésion cutanée ni porteurs d’ectoparasites, et aptes au transport ;
- Le statut de détention répond à toutes les exigences règlementaires liées à l’espèce et à l’établissement exposant ;
- Ils présentent à tout contrôle les certificats de capacité, le cas échéant ;
- Ils présentent à tout contrôle la preuve de la détention légale des spécimens.
7.3. Déroulement de la manifestation
La spécificité des animaux aquatiques d’ornement non domestiques, impose quelques principes :
- Tester le bon fonctionnement des moyens de sécurité (incendie, électrique…) avant l’ouverture ;
- Vérifier la conformité des espèces présentées selon leur niveau de dangerosité, de protection et leur origine (élevage, prélèvement en mer) ;
• Vérifier l’état sanitaire des animaux et des végétaux ; - S’assurer des moyens d’information sur la maintenance des espèces (étiquette, document d’information) ;
- S’assurer que les conditions de transport et d’exposition assurent le bien-être des animaux ;
- Proposer un récipient d’eau chlorée pour la désinfection des accessoires de manipulations (épuisettes, pinces…) ;
- S’assurer de la délivrance systématique du certificat de cession adapté à l’espèce ;
- Collecter et éliminer les déchets, le cas échéant après désinfection ;
- Vérifier que les règles sanitaires et de bonnes pratiques ci-dessous sont respectées.
8. Règles sanitaires et bonnes pratiques d’élevage
Ces pratiques, en partie issues d’obligations règlementaires, s’adressent à tout élevage professionnel et amateur.
8.1. Maintenance
- S’informer des besoins de chaque espèce et constituer son document d’identification ;
- Adapter la maintenance aux espèces pour assurer le bien-être des individus ;
- Suivre les entrées et sorties quand elles sont imposées, et autant que nécessaire ;
- Manipuler les spécimens sans nuire à leur santé (stress, taille d’épuisette, contenants…) ;
- Désinfecter les cuves vidées et les équipements à l’eau chlorée ;
- Désinfecter l’eau (javel) avant rejet dans le circuit des eaux usées (circuit d’eaux de pluies et milieu naturel exclus) ;
- Ne pas relâcher des animaux vivants dans des installations ouvertes (fermes aquacoles, coralliculture), ni dans le milieu naturel (mer, étangs) sans autorisation légale.
8.2. Conditionnement, transport
- S’assurer que le lieu de destination est conforme et répond aux besoins des espèces ;
- S’assurer que le destinataire est apte à maintenir les spécimens avec, le cas échéant, son certificat de capacité ;
- Les spécimens vivants doivent être préparés, déplacés et soignés de manière à minimiser les risques de blessure, de maladie et de traitement rigoureux.
- Les contenants de transport sont propres, le cas échéant désinfectés et conçus de telle sorte que les déjections, fuites… ne peuvent pas s’écouler pendant le transport ;
- Adapter les contenants aux animaux aquatiques : conditionnement par espèce ou par spécimen ; moyen de se fixer (perlon pour crevettes…) ; volume d’eau et réserve d’air adaptés à l’espèce et à la biomasse des animaux ;
- L’emballage doit être résistant, protecteur (chocs, chutes), étanche, non blessant, stable thermiquement (isolation, chaufferettes) ;
- S’assurer que jusqu’à destination les animaux n’en contamineront pas d’autres par contact (statut sanitaire équivalent ; autres lots d’animaux d’origine ou de provenance identique) ;
- Acclimater les animaux suivant des protocoles éprouvés (goutte à goutte, règle du 1/3…).
- Détruire ou nettoyer et désinfecter les contenants et emballages pour prévenir tout danger de transmission de maladie à l’homme ou à l’animal.
Cet article n’aborde pas sciemment le sujet des sanctions pénales encourues pour questions financières, sanitaires ou d’illégalité. Elles ne sont rien par rapport à un loisir perdu ou une vie sociale affectée. Il n’y rien de satisfaisant à subir les questions d’enquêteurs, voir se détourner les amis, se dissimuler derrière un nouveau pseudo jamais anonyme. Je ne savais pas… cette lecture ne permet plus de se retrancher derrière cette excuse irresponsable et j’en suis convaincu, ce ne sera pas le cas. Allez, puisque les chiffres parlent parfois, les sanctions peuvent aller jusqu’à un an d’emprisonnement et 15 000€ d’amende.
Cet inventaire législatif a pu paraitre rébarbatif et c’est bien compréhensible. Les interactions entre l’Homme et le monde sauvage sont nombreuses, elles justifient l’importance des dispositions prises à tous les niveaux. Aussi devons-nous privilégier chaque fois que possible l’acquisition de spécimens issus d’élevage. La détention en captivité d’espèces sauvages parait inacceptable pour certains, même si les retombées d’une gestion raisonnée sont positives sur les populations locales. Pour être admise, le circuit de l’aquariophilie marine doit être règlementé dans sa totalité, jusqu’à l’éleveur amateur, pour que la protection des espèces ne soit pas vaine, pour que l’élevage chez un particulier ne reste pas un simple agrément, pour que l’aquariophilie serve à l’enrichissement des connaissances, pour que les animaux ne soient plus (seulement) des éléments d’ornement, et surtout…
Parce qu’ils sont notre patrimoine !
Merci aux services de l’État, dont la DDCSPP de Tarn et Garonne, pour leur précieuse collaboration.
Article paru dans Zebrasomag n° 49, 50 et 51, publié sur Cap récifal le 14 juillet 2021.
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